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vous apprendre bien des choses, s’il lui plaît de causer avec vous… mais tenez-vous toujours hors de la portée de ces prétendus arts secrets qu’il n’emploiera que pour vous tourner en ridicule. » Après ces dernières paroles que l’Acolouthos aurait peut-être difficilement expliquées lui-même, l’officier et le soldat se quittèrent.


CHAPITRE IX.

L’HOMMAGE.


En travers de la gorge écumante du torrent blanchissant, l’artiste habile élève soudain une barrière. À l’aide de niveaux, subdivisant leur force, il dérobe les eaux à leur lit rocailleux, pour diminuer celle qu’il veut dompter ; puis il ouvre au reste une route facile à suivre, et pénible à quitter, conduisant vers le but auquel il voulait arriver.
L’Ingénieur.


Il aurait été facile à Alexis, en avouant tout haut ses soupçons, ou en ne réfléchissant pas profondément à la manière dont il devait prendre cette invasion tumultueuse des nations européennes dans son empire, de réveiller soudain le souvenir des griefs nombreux qu’elles avaient contre l’empereur des Grecs. Une semblable catastrophe n’aurait pas été moins certaine, s’il avait tout d’abord renoncé à toute idée de résistance, et mis toutes ses espérances dans sa résignation à livrer aux Occidentaux tout ce qu’ils jugeraient convenable de prendre. L’empereur se tint dans un juste milieu ; et indubitablement, vu la faiblesse de l’empire grec, c’était le seul parti qui pût à la fois le mettre hors de tout danger, et lui donner un grand degré d’importance aux yeux des Francs et à ceux de ses propres sujets. Mais les moyens qu’il employa furent de différentes espèces, et, plutôt par politique que par inclination, entachés souvent de fausseté et de bassesse. Les mesures de l’empereur ressemblaient aux ruses du serpent qui se cache sous les herbes, afin de piquer insidieusement ceux qu’il craint d’approcher, comme le ferait un lion hardi et généreux. Cependant nous n’avons pas dessein d’écrire l’histoire des croisades, et ce que nous avons déjà dit des précautions prises par l’empereur dès la première apparition de Godefroy de Bouillon peut suffire à l’éclaircissement de notre récit.

Quatre semaines environ s’étaient écoulées, marquées par des querelles et des réconciliations entre les croisés et les Grecs. Suivant la politique d’Alexis, les croisés étaient reçus parfois et indi-