Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/81

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cement de la bataille ? — Je vous ai vu quand tout était fini, voisin, » répondit le gantier sèchement.

« Vrai, vrai ; j’avais oublié que vous étiez dans votre maison pendant que les coups roulaient, et que vous ne pouviez apercevoir qui les faisait rouler. — Paix ! voisin Proudfute ; je vous en prie, paix ! » dit Craigdallie, qui était manifestement ennuyé des cris discordants du digne syndic.

« Il y a du mystère là-dessous, ajouta le bailli ; mais je crois tenir le secret. Notre ami Simon est, comme vous savez tous, un homme paisible, qui souffrira sans rien dire le mal qu’on lui fait, plutôt que de mettre un ami ou un voisin en danger pour se faire justice. Toi, Henri, qui ne manques jamais, quand la ville a besoin d’un défenseur, dis-nous ce que tu sais de cette affaire. »

Notre armurier conta son histoire de même que nous l’avons déjà rapportée ; et l’important bonnetier ajouta comme devant : « Et tu m’y as vu, honnête Smith, n’est-ce pas ? — Non pas, sur ma parole, voisin, répondit Henri ; mais vous êtes petit, comme vous savez, et j’aurai pu ne pas vous distinguer. »

Cette réplique fit rire aux dépens d’Olivier, qui rit de compagnie ; mais il ajouta d’un air de mauvaise humeur : « J’étais un des premiers à courir au secours malgré tout. — Mais où étais-tu donc, voisin ? demanda Henri ; car je ne t’ai pas aperçu, et j’aurais donné le prix de la meilleure armure complète que j’aie jamais fabriquée pour voir un luron vigoureux comme toi à mon côté. — J’en étais cependant assez près, honnête Smith ; et tandis que tu appliquais tes coups, comme si tu eusses tapé sur une enclume, je parais ceux que le reste des brigands tâchaient de t’appliquer par derrière ; et voilà pourquoi tu ne m’as point vu. — J’ai ouï parler de forgerons du vieux temps qui n’avaient qu’un œil, dit Henri ; j’en ai deux, mais ils sont tous deux logés au bas de mon front, et ainsi je ne puis voir derrière moi, voisin. — La vérité est pourtant, » répéta avec obstination maître Olivier, « que j’y étais, et je veux faire mon rapport de l’affaire au maître bailli ; car l’armurier et moi avons commencé la bataille. — En voilà assez pour le moment, » dit le bailli en intimant de sa main à maître Proudfute l’ordre de se taire. « Les dépositions de Simon Glover et d’Henri Gow suffiraient dans une affaire moins digne de foi ; et maintenant, mes maîtres, à votre avis, que fera-t-on ? Voilà tous nos droits de bourgeoisie méconnus et méprisés, et vous pouvez bien imaginer que c’est par le fait d’un homme puis-