Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/425

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ceux qui en sont animés à se soumettre tranquillement au déshonneur plutôt que de s’exposer au péril. Au contraire, il était moralement brave et physiquement timide ; et la honte d’éviter le combat devint en ce moment plus puissante que la crainte d’y faire face.

« Je ne veux pas entendre parler, dit-il, d’un projet qui laisserait mon épée dans le fourreau pendant le glorieux combat de ce jour. Si je suis jeune dans les armes, il y a assez de braves guerriers autour de moi que je puis imiter, sinon égaler. »

Il prononça ces mots avec une vivacité qui en imposa à Torquil, et peut-être au jeune chef lui-même.

« À présent, que Dieu bénisse son noble cœur ! se dit le père nourricier. J’étais sûr que le mauvais charme se romprait, et que l’humeur timide qui l’assiégeait s’enfuirait au son de la cornemuse et à la première vue du drapeau flottant ! — Écoutez, lord maréchal, dit le connétable : l’heure du combat ne peut être différée de beaucoup, car voilà midi qui approche ; que le chef du clan Chattan emploie la demi-heure qui reste à trouver, s’il peut, un remplaçant pour son déserteur ; sinon, qu’ils se battent comme ils sont. — J’y consens, dit le maréchal, quoique je ne voie guère, puisqu’il n’y a pas âme vivante de son clan à moins de cinquante milles, comment Mac-Gillie trouvera un auxiliaire. — C’est son affaire, dit le grand connétable ; mais s’il offre une riche récompense, il y a assez de vigoureux gaillards autour de la lice qui seront charmés de faire jouer leurs membres dans une lutte comme celle qu’on attend. Moi-même, sans ma qualité et ma charge, je prendrais joyeusement de l’ouvrage parmi ces sauvages lurons, et je penserais y attraper quelque honneur. »

Ils communiquèrent leurs décisions aux montagnards, et le chef du clan de Chattan répliqua : « Vous avez jugé impartialement et noblement, milord, et je me tiens pour obligé à suivre vos avis… Proclamez donc, hérauts, que si un guerrier veut partager avec le clan Chattan les honneurs et les périls de la journée, il recevra une couronne d’or comptant, et la permission de se battre à mort dans mes rangs. — Vous êtes avare de vos trésors, chef, dit le comte maréchal ; une couronne d’or n’est qu’une pauvre solde pour une campagne comme celle qui va commencer. — S’il est ici un homme prêt à combattre pour l’honneur, répondit Mac-Gillie Chattanach, il s’estimera assez payé ; et je ne demande pas les services d’un coquin qui tire son épée pour l’or seul. »