Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/408

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réception amicale de l’honnête bourgeois, et de l’accueil semblable au temps d’avril, c’est-à-dire moitié favorable, moitié sévère, qu’il attendait de son aimable fille, il apprit l’étonnante nouvelle qu’elle et son père s’étaient mis en route de grand matin, avec un étranger qui se cachait soigneusement le visage de peur d’être reconnu. Dorothée, dont le lecteur connaît le talent pour prévoir le mal et faire part aux autres de ses sinistres prévisions, jugea à propos d’ajouter que son maître et sa jeune maîtresse n’étaient partis pour les Highlands qu’afin d’éviter la visite de deux ou trois officiers de police, qui étaient arrivés bientôt après, au nom de la commission instituée par le roi ; ces personnages avaient fait des recherches dans la maison, apposé le scellé sur tous les meubles qui paraissaient contenir des papiers, et laissé des citations pour le père et la fille à comparaître devant cette commission, au jour marqué, sous peine d’être mis hors la loi. Dorothée prit soin de représenter toutes ces particularités sous les plus sombres couleurs ; la seule consolation qu’elle donna à l’amant désolé fut de lui dire que Simon Glover l’avait chargée de l’engager à rester tranquille à Perth, et qu’avant peu il recevrait de leurs nouvelles. Cela ébranla la première résolution de Smith, qui avait été de les suivre sur-le-champ dans les Highlands, et de partager le sort qui leur était réservé.

Mais quand il se rappela ses altercations fréquentes avec différents membres du clan de Quhele, et particulièrement sa querelle personnelle avec Conachar, qui se trouvait maintenant élevé au rang d’un des principaux chefs, il ne put s’empêcher de reconnaître que sa présence serait plutôt capable de nuire à la sûreté de ses amis que de leur rendre aucun service. Il connaissait bien l’intimité de Simon avec le chef du clan de Quhele, et pensait avec justice que le gantier obtiendrait une protection que sa propre arrivée troublerait probablement ; tandis que d’une part, tout son courage à lui, Smith, ne pourrait que peu lui servir dans une querelle avec toute une tribu de montagnards vindicatifs. En même temps son cœur palpitait d’indignation quand il songeait que Catherine était absolument au pouvoir du jeune Conachar, qu’il croyait fortement avoir pour rival, et qui avait alors tant de moyens de mener à bonne fin son amour. Et si le jeune chef allait mettre pour condition à la sûreté du père les faveurs de la fille ? Henri ne se méfiait pas des sentiments de Catherine ; mais encore sa façon de penser était si désintéressée, et son affec-