Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/400

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à vous dire, sir John Ramorny, répondit Éviot. Nous ne voulons pas combattre pour cette querelle. — Comment ! mes propres écuyers se révoltent contre moi ? — Nous étions vos écuyers et vos pages, milord, quand vous étiez grand-maître de la maison du duc de Rothsay. Le bruit s’est répandu que le duc a cessé de vivre… nous désirons savoir ce qui en est. — Quels traîtres osent répandre de pareilles impostures ? — Tous ceux qui sont allés jusqu’à la forêt ont rapporté cette nouvelle, milord, et moi comme les autres. La chanteuse qui s’est évadée du château hier a répandu partout le bruit que le duc de Rothsay a été assassiné, ou qu’il est aux portes de la mort. Les Douglas arrivent avec une force imposante… — Et vous, lâches, vous prenez avantage d’une vaine rumeur pour abandonner votre maître ! » interrompit Ramorny d’un ton d’indignation.

« Milord, répondit Éviot, que Buncle et moi nous voyions le duc de Rothsay afin de recevoir ses ordres personnels, et si nous ne combattons pas alors pour la défense du château jusqu’à la mort, je consens à être pendu à la plus haute tourelle. Mais s’il est mort de mort naturelle, nous remettrons le château à Douglas, qui est, dit-on, le lieutenant du roi. Si… ce qu’à Dieu ne plaise !… le noble prince est mort assassiné, nous ne voulons pas nous rendre complices du crime, en portant les armes pour la défense des assassins, quels qu’ils soient. — Éviot, » dit Ramorny en levant son bras mutilé, « si ce gantelet n’eût pas été vide, tu n’aurais pas vécu assez pour proférer deux mots de cet insolent discours. — Insolent ou non, répliqua Éviot, nous ne faisons que notre devoir. Je vous ai suivi long-temps, milord, mais aujourd’hui je dois retenir la bride. — Eh bien, adieu, et malédiction sur vous tous ! s’écria le baron transporté de colère. « Qu’on selle mon cheval ! — Sa Vaillance va prendre la fuite, » dit le médecin, qui s’était glissé à côté de Catherine sans qu’elle s’en aperçût. « Catherine, vous êtes une folie superstitieuse comme toutes les femmes ; cependant vous avez de l’esprit, et je vous parle comme à un être possédant plus d’intelligence que tous les buffles qui nous entourent. Ces barons hautains qui oppriment le monde, que sont-ils aux jours de l’adversité ?… Une paille que le vent emporte. Que leurs mains qui frappent comme des marteaux, que leurs jambes qui ressemblent à des piliers, éprouvent quelque dommage… et bah !… les hommes d’armes n’y sont plus ! Le cœur et le courage ne sont rien chez eux, les membres et les