Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/333

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chargées de tous les travaux domestiques. Les hommes, après avoir manié avec répugnance une grossière charrue, ou plus souvent une bêche, tâche qu’ils remplissaient à contre-cœur, et qu’ils considéraient comme fort au-dessous d’eux, ne s’occupaient plus que de la garde de leurs troupeaux qui faisaient toutes leurs richesses. Tout le reste du temps, ils chassaient, pêchaient, ou maraudaient, dans les courts intervalles de paix, par manière de passe-temps ; pillant avec une licence encore plus hardie, et combattant avec l’animosité la plus acharnée pendant la guerre, qui, privée ou publique, sur un théâtre plus ou moins étendu, faisait la principale affaire de leur vie, et la seule qu’ils crussent digne d’eux.

Le lac lui-même offrait un spectacle qu’on ne pouvait contempler qu’avec admiration. Sa noble étendue, le beau fleuve qui en découlait, étaient rendus encore plus pittoresques par une de ces petites îles qui sont souvent si heureusement placées dans les lacs d’Écosse. Les ruines qui se trouvent encore sur cette île, aujourd’hui presque sans formes et recouvertes par les bois, formaient, à l’époque dont nous parlons, les murs et les tours d’un prieuré où reposaient les restes de Sybille, fille de Henri Ier d’Angleterre et femme d’Alexandre Ier d’Écosse. Ce saint lieu avait été jugé digne de recevoir les restes du chef du clan de Quhele, au moins jusqu’au moment où, le danger étant passé, on pourrait transporter le corps dans un célèbre couvent du nord, où il devait reposer définitivement avec tous ses ancêtres.

Un grand nombre de bateaux partaient de différents points du rivage, les uns déployant des bannières noires, d’autres ayant sur leur proue des joueurs de cornemuse, qui de temps à autre faisaient entendre quelques notes aiguës d’un caractère plaintif et mélancolique, qui firent penser au gantier que la cérémonie allait commencer. Ces sons plaintifs n’étaient qu’une espèce de prélude, comparé aux lamentations générales qui devaient bientôt se faire entendre.

Un bruit éloigné se fit entendre de l’extrémité du lac, et même, à ce qu’il semblait, des vallées reculées d’où descendent le Dochard et le Lochy pour apporter leurs eaux au lac de Tay. C’était dans un lieu sauvage, inaccessible, où les Campbell, à une époque plus récente, fondèrent leur forteresse de Finlayrigg ; c’était là que le chef redouté du clan de Quhele avait rendu le dernier sou-