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rent forcés de se séparer pour se rendre chacun dans leur retraite. Alors, pour la première fois, Catherine, voyant que l’inquiétude avait banni de l’esprit de son père tout souvenir de son ami, laissa échapper, comme dans un songe, le nom de Henri Gow.

« C’est vrai, c’est vrai, dit Simon ; il faut lui faire savoir notre dessein. — Laissez-m’en le soin, répliqua sir Patrick ; je ne confierai point cette commission à un messager, ni n’enverrai de lettre ; car si je lui en écrivais une, je crois qu’il ne pourrait pas la lire. Il sera inquiet un instant ; mais demain j’irai à Perth, et je lui apprendrai le parti que vous avez pris. »

L’instant de se séparer approchait ; il était cruel, mais le caractère mâle du vieux bourgeois et la pieuse résignation de Catherine l’adoucirent plus qu’on ne pouvait s’y attendre. Le bon chevalier pressa le départ de Simon, mais de la manière la plus bienveillante ; il alla même jusqu’à lui offrir de lui prêter de l’or, ce qui, dans un pays et à une époque où les espèces étaient si rares, pouvait être considéré comme le nec plus ultra de l’obligeance. Néanmoins le gantier l’assura qu’il en était amplement muni, et dirigea sa route vers le nord-ouest. La protection hospitalière de sir Patrick de Charteris ne se manifesta pas moins à l’égard de la jolie fille de Simon. Elle fut confiée à une duègne qui surveillait la maison du chevalier, pendant le temps qu’elle fut forcée de passer à Kinfauns, à cause des obstacles et des délais d’un batelier du Tay, nommé Kittstenhaw, qui devait la conduire à Falkland, et en qui le prévôt avait beaucoup de confiance.

Ainsi se séparèrent le père et la fille dans un instant difficile et dangereux ; des circonstances ignorées du gantier et de sa fille rendaient cette crise plus périlleuse encore qu’elle ne leur paraissait, et diminuait beaucoup la chance de salut qui leur restait.


CHAPITRE XXVII.

LE VOYAGE.


Austin l’a fait humblement. L’a-t-il fait ? dit-il. Austin peut le faire aussi pour moi.
Pope.


Nous ne pouvons mieux suivre le fil de notre histoire qu’en accompagnant Simon Glover dans son voyage. Notre dessein n’est point d’indiquer exactement les limites des deux clans en-