Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/227

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des fatigues et des tourments de la souveraineté, sera bientôt disposé à abdiquer la couronne. Ainsi, longue vie à notre brave et jeune monarque, le roi Robert IV.

Ille manu fortis,
Anglis ludet in hortis[1].

— Et notre père et prédécesseur, dit Rothsay, continuera à vivre pour prier pour nous comme notre chapelain, en reconnaissance du privilège que nous lui accorderons de ne reposer sa tête grise dans le tombeau que lorsque le cours de la nature le permettra… Ou bien aura-t-il à supporter quelques-unes de ces négligences par suites desquelles les hommes cessent de vivre, et échangent les limites d’une prison, ou d’un couvent, ce qui n’en diffère guère, contre la noire et paisible demeure, où le méchant cesse de faire le mal, et l’homme fatigué se repose. — Vous plaisantez, milord, répliqua Ramorny ; faire au bon vieux roi le moindre mal, serait à la fois barbare et impolitique. — Pourquoi reculeriez-vous, » répondit le prince avec un sombre mécontentement ; « votre plan est une leçon de scélératesse surnaturelle guidée par une ambition imprévoyante ?… Si le roi d’Écosse peut à peine tenir tête à ses nobles, maintenant qu’il peut lever contre eux une bannière honorable et sans tache, qui voudra suivre un prince souillé de la mort de son oncle et de l’emprisonnement de son père ? Ta politique révolterait un divan d’infidèles, pour ne rien dire du conseil d’un peuple chrétien… Tu as été mon maître, Ramorny, et j’ai le droit peut-être de m’excuser sur tes leçons et ton exemple de quelques-unes des folies qu’on me reproche. Peut-être sans toi ne serais-je pas à minuit sous ce déguisement insensé, » ajouta-t-il en jetant un regard sur ses habits, « occupé à entendre un débauché ambitieux qui me propose d’assassiner mon oncle et de détrôner le meilleur des pères. Cependant puisque c’est ma faute aussi bien que la tienne qui m’a entraîné si avant dans le gouffre de l’infamie, il ne serait pas juste que toi seul en portasses la peine. Mais n’aie pas l’audace de me proposer une seconde fois ce projet, au péril de ta vie. Je te dénoncerais à mon père… À Albany… À l’Écosse… Dans sa longueur et dans sa largeur, à chaque croix sur les places publiques de notre pays, serait attaché un morceau du corps du traître qui conseilla de telles horreurs à l’héritier d’Écosse ! Mais j’espère que la fiè-

  1. Courageux à la guerre, il ira jouer dans le jardin d’Angleterre. a. m.