Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/226

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seulement de mon royaume ? Ce serait une affreuse impiété ; c’est le frère de mon père, ils se sont assis sur les genoux du même père, ont reposé sur le sein de la même mère… Tais-toi, Ramorny ; quelle folie on te fait croire, grâce à ta maladie ! — Croire, dit Ramorny ; c’est la première fois qu’on m’appelle crédule ; mais l’homme par qui Albany m’a fait apporter ces propositions, sera cru de tout le monde, chaque fois qu’il parlera d’une mauvaise action… les médicaments mêmes préparés par lui ont un amer goût de poison. — Fi donc ! un tel scélérat calomnierait un saint. Ramorny, tu t’es laissé tromper une fois, malgré toute ta finesse. Mon oncle d’Albany est ambitieux ; il voudrait assurer à lui et à sa maison une portion d’autorité et de richesses plus considérables que cela n’est juste ; mais supposer qu’il pense à détrôner ou à assassiner son frère… Fi, Ramorny ! ne me force pas à te citer le vieux proverbe : « Que ceux qui font le mal, craignent le mal… » Tu exprimes des soupçons ; tu ne sais rien de positif. — Votre Grâce est dans une fatale erreur… Je vais achever : le duc d’Albany est généralement haï pour son avarice et sa cupidité… Votre Altesse est peut-être plus aimée que… »

Ramorny s’arrêta ; le prince continua d’un ton calme : « Plus aimée qu’honorée, c’est ce que je désire, Ramorny. — Au moins, vous êtes plus aimé que craint, et c’est une condition peu sûre pour un prince. Mais engagez-moi votre honneur et votre parole de chevalier que vous ne m’en voudrez pas pour les bons services que je vous rendrai ; prêtez-moi votre sceau pour engager vos amis en votre nom, et le duc d’Albany n’aura plus d’autorité dans cette cour, avant que la main qui terminait jadis ce bras mutilé se réunisse de nouveau à mon corps, et exécute les ordres de ma volonté. — Vous n’oseriez pas tremper vos mains dans le sang royal, » dit le prince d’une voix sévère. — Que dites-vous… En aucune façon… Le sang n’a pas besoin d’être répandu ; la vie peut s’éteindre d’elle-même. Faute de la nourrir d’huile nouvelle, de la protéger contre le souffle du vent, la lumière ne peut manquer de s’éteindre dans la lampe. Laisser un homme mourir ce n’est pas le tuer. — C’est vrai… J’avais oublié cette distinction… Supposez donc que mon oncle Albany cesse de vivre… Je pense que c’est comme cela qu’il faut dire… Qui alors gouvernera la cour d’Écosse ? — Robert III, avec le consentement, sous l’autorité et par les conseils du très-puissant David, duc de Rothsay, lieutenant du royaume, et alter ego ; en faveur de qui le bon roi, las