Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 22, 1838.djvu/89

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et porteur d’un message tel qu’il convient entre deux honorables ennemis, le priant de se hâter de guérir de sa fièvre pour se préparer à recevoir la visite du soudan, qui viendra, le cimeterre à la main, à la tête de cent mille cavaliers. Vous plairait-il, vous qui êtes du conseil secret du roi, de faire décharger ces chameaux et de donner des ordres au sujet de la réception du savant médecin ?

— C’est merveilleux ! » dit de Vaux comme se parlant à lui-même ; « et qui garantira l’honneur de Saladin quand une perfidie le débarrasserait tout d’un coup de son plus puissant ennemi ?

— Je lui servirai moi-même de caution : j’engage pour lui mon honneur, ma fortune et ma vie.

— C’est étrange ! » s’écria de nouveau le baron, « le Nord répond pour le Midi, l’Écossais pour le Turc… Ne puis-je pas vous demander, sire chevalier, comment vous vous êtes trouvé mêlé dans cette affaire ?

— J’ai été absent, dit sir Kenneth, pour accomplir un pélerinage dans le cours duquel j’avais à m’acquitter d’un message pour le saint ermite d’Engaddi.

— Ne peut-il pas m’être confié, sir Kenneth, ainsi que la réponse du saint homme ?

— Cela ne se peut, milord, répondit l’Écossais.

— Je suis du conseil secret d’Angleterre, » reprit le lord anglais avec hauteur.

« Je ne suis pas soumis au gouvernement de ce pays, quoique je me sois volontairement attaché au sort personnel de son souverain ; j’ai été envoyé par le conseil général des rois, princes et chefs suprêmes de l’armée de la bienheureuse croix, et c’est à eux seuls que je dois compte de mon message.

— Ah ! ah ! parlez-vous sur ce ton. — Eh bien ! sachez, messager des rois et des princes, qu’aucun médecin n’approchera un lit du roi d’Angleterre sans le consentement du lord Gilsland, et ceux qui oseront s’y exposer s’embarqueront dans une dangereuse entreprise. »

Il allait passer avec fierté, lorsque l’Écossais s’approchant de plus près et le regardant en face, lui demanda d’un air calme, mais qui pourtant n’était pas exempt d’orgueil, si le lord de Gilsland le regardait comme un gentilhomme et un bon chevalier.

« Tous les Écossais sont nobles par droit de naissance, » répondit de Vaux un peu ironiquement ; mais sentant son injustice et s’apercevant que le front de sir Kenneth se colorait, il ajouta :