Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 22, 1838.djvu/61

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

par le voile qui enveloppait sa tête, et dont les accents semblaient sortir d’un suaire… « Reste… reste… heureux mortel, puisque cela t’est permis… la vision n’est pas encore terminée… » En parlant ainsi, il se retira en arrière du seuil où il s’était couché, et ferma la porta de la chapelle qui, assurée en dedans par un ressort dont le bruit fit retentir la voûte, se rejoignit au roc vif dans lequel ce caveau avait été creusé. Elle parut faire tellement partie du rocher, que Kenneth eut de la peine à distinguer aucune fente qui lui en indiquât l’existence. Il se trouva alors tout seul dans la chapelle bien éclairée qui contenait la relique à laquelle il venait de rendre hommage, seul, sans autre arme que son poignard, sans autre compagnie que celle de ses pieuses réflexions et de son courage intrépide.

Incertain de ce qui allait lui arriver, mais décidé à suivre le cours des événements, sir Kenneth se promena à pas lents dans la chapelle solitaire jusqu’au moment où se fait entendre le premier chant du coq. À cette heure silencieuse où le jour et la nuit se touchent, il crut ouïr, mais sans pouvoir distinguer de quel côté venait le son, le tintement d’une de ces petites sonnettes d’argent qui annoncent l’élévation de l’hostie pendant le sacrifice de la messe. L’heure et le lieu donnaient à ce bruit léger quelque chose de solennel et d’effrayant ; et tout intrépide qu’il était, le chevalier jugea à propos de se retirer dans le coin le plus éloigné de la chapelle et en face de l’autel, pour observer sans interruption les conséquences de ce signal inattendu.

Il ne fut pas long-temps sans voir le rideau s’ouvrir de nouveau et la relique s’offrir encore à ses regards. En tombant respectueusement à genoux, il entendit le chant des laudes, ou le premier office du matin de l’Église catholique que célébraient des voix de femmes, jointes en chœur comme précédemment. Le chevalier ne tarda pas à s’apercevoir que ces voix ne restaient plus stationnaires dans l’éloignement, mais qu’elles s’approchaient de la chapelle et devenaient de plus en plus fortes. Bientôt une porte aussi imperceptible lorsqu’elle était fermée, que celle par laquelle il était entré lui-même, s’ouvrit de l’autre côté de la chapelle, et les chants du chœur vinrent résonner avec plus d’éclat sous les voûtes sacrées du temple.

Le chevalier, les yeux fixés sur la porte, respirant à peine et palpitant d’une impatiente curiosité, continua d’attendre, à genoux et dans l’attitude pieuse que cette scène et ce lieu lui commandaient