Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 22, 1838.djvu/310

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— Tu te connais mieux en bêtes qu’en hommes, de Vaux, dit le roi.

— Je ne le nierai pas, répondit de Vaux, et j’ai souvent trouvé que de ces deux espèces d’animaux, les premiers étaient les plus honnêtes. Ensuite il plaît quelquefois à Votre Grâce de m’appeler brute moi-même ; et d’ailleurs, je sers le lion que tout le monde reconnaît pour le roi des animaux.

— Ma foi, tu as rompu ta lance sur ma tête. J’ai toujours dit que tu avais une espèce d’esprit, de Vaux, quoiqu’il faille le frapper avec un gros marteau de forge pour en tirer des étincelles. Mais occupons-nous de l’affaire en question : notre chevalier est-il bien armé et bien équipé ?

— Complètement, monseigneur, et noblement, répondit de Vaux ; j’ai reconnu l’armure qu’il porte, c’est celle que le provéditeur de Venise offrit à Votre Altesse, avant sa maladie, pour cinq cents besants.

— Il l’a vendue à l’infidèle soudan, je gage, pour quelques ducats de plus, et en argent comptant. Ces Vénitiens vendraient jusqu’au Sépulcre.

— Cette armure ne pouvait être portée dans une plus noble cause, répliqua de Vaux.

— Grâce à la noblesse du Sarrasin, et non à l’avarice du Vénitien.

— Plût au ciel que Votre Grâce voulût parler avec plus de prudence ! » dit de Vaux avec inquiétude. « Nous voilà abandonnés par nos alliés pour des offenses faites aux uns et aux autres ; nous ne pouvons espérer aucun avantage dans ce pays ; il ne nous reste plus qu’à nous brouiller avec la république amphibie pour perdre les moyens de nous retirer par mer.

— Je serai prudent, » dit Richard avec impatience ; « mais cesse de me sermonner. Dis-moi plutôt, car c’est une chose importante, si le chevalier a un confesseur ?

— Il en a un. C’est ce même ermite d’Engaddi qui lui a déjà rendu ce service lorsqu’il se préparait au supplice. L’ermite s’est rendu ici, attiré sans doute par le bruit du combat.

— C’est bon ; et maintenant, quant à la requête du chevalier, dis-lui que Richard le recevra, quand, par l’accomplissement de son devoir auprès du Diamant du désert, il aura réparé la faute commise au mont Saint-George. En traversant le camp va prévenir la reine que mon intention est d’aller lui rendre visite dans sa tente, et dis à Blondel de s’y trouver. »