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« Un roi, dit le monarque français, est autant au dessus du marquis qu’un chien serait au dessous. Roi Richard, ceci ne peut pas être. Vous êtes le chef de notre expédition, l’épée et le bouclier de la chrétienté.

— Je proteste contre un tel combat, » dit le provéditeur vénitien, « jusqu’à ce que le roi Richard ait rendu les 50,000 besants qu’il doit à notre république. C’est assez d’être menacé de perdre cette somme si notre débiteur vient à tomber entre les mains des païens, sans courir encore le risque de le voir perdre la vie dans des querelles avec des chrétiens au sujet de chiens et de bannières.

— Et moi, dit le comte de Salisbury, je proteste à mon tour contre tout dessein qu’aurait le roi mon frère d’exposer ainsi sa vie qui appartient à son peuple d’Angleterre. Reprenez donc votre gant, mon noble frère, et qu’il n’en soit pas autre chose que si le vent l’avait emporté. Le mien va prendre sa place. Un fils de roi, quoique avec le chevron de bâtardise sur ses armes, est un adversaire au moins assez noble pour ce freluquet de marquis.

— Princes et nobles, dit Conrad, je n’accepterai pas le défi du roi Richard. Nous l’avons choisi pour chef contre les Sarrasins ; et si sa conscience peut lui permettre d’appeler un allié au combat pour une querelle aussi frivole, la mienne du moins ne me permet point de l’accepter. Mais quant à son frère bâtard, William de Woodstock, ou tout autre qui soutiendra cette fausse accusation et voudra s’en rendre responsable, je défendrai contre lui mon honneur en champ clos, et prouverai que quiconque ose l’attaquer est un parjure et un menteur.

— Le marquis de Montferrat, » dit l’archevêque de Tyr, « a parlé comme un gentilhomme sage et modéré, et il me semble que cette querelle pourrait en demeurer là, sans qu’aucun parti s’en trouvât déshonoré.

— Il me semble aussi qu’elle pourrait se terminer ainsi, dit le roi de France, pourvu que le roi Richard voulût rétracter son accusation comme fondée sur des bases trop légères,

— Philippe de France, répondit Cœur-de-Lion, mes paroles ne démentiront pas à ce point ma pensée. J’ai accusé ce Conrad d’être venu dans l’ombre de la nuit voler l’emblème représentatif de la dignité d’Angleterre. Je le crois coupable de ce vol et je persiste à l’en accuser ; et quand on aura fixé le jour du combat, ne doutez pas, puisque Conrad refuse de me combattre en personne, que je ne trouve un champion qui paraîtra pour soutenir mon défi ; car