Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 22, 1838.djvu/252

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pelle ailée, et à laquelle aucune n’est égale en rapidité, excepté le Borack du Prophète. Ils sont nourris avec l’orge dorée du Yémen, mêlée d’épices et d’une petite quantité de chair de mouton séchée. Des rois ont donné des provinces pour les posséder ; et leur vieillesse est aussi active que leur jeune âge. Toi, nazaréen, tu es le premier qui, sans faire partie des vrais croyants, ait pressé les flancs d’un de ces nobles animaux dont le Prophète fit don lui-même au bienheureux Ali, si justement surnommé son parent et son lieutenant. La main du temps passe si légèrement sur ces généreux coursiers, que la jument que tu montes à présent a vu s’écouler cinq fois cinq ans, et cependant elle conserve sa rapidité et sa vigueur primitives ; seulement l’aide d’une bride maniée par une main plus expérimentée que la tienne est devenue nécessaire pour la diriger dans la carrière. Béni soit le Prophète qui a donné aux vrais croyants le moyen d’avancer et de se retirer, tandis que leurs ennemis, revêtus du fer, succombent sous leur propre poids ! Comme les chevaux de ces chiens de templiers ont dû souffler et haleter après s’être enfoncés dans le désert jusqu’au dessus du fanon, pendant la vingtième partie de l’espace que ces braves coursiers ont parcouru, sans que leur respiration devînt pénible, sans qu’une goutte de sueur mouillât leur robe lisse et veloutée ! »

Le chevalier écossais, qui avait commencé à reprendre la faculté de respirer et d’écouter, ne put s’empêcher de reconnaître intérieurement l’avantage que ces chevaux, aussi propres à l’attaque qu’à la fuite, et si admirablement constitués pour parcourir les déserts plats et sablonneux de l’Arabie et de la Syrie, donnaient aux guerriers orientaux. Mais il ne voulait pas augmenter l’orgueil du musulman en convenant de cette supériorité ; il laissa donc tomber la conversation, et, regardant autour de lui, il put, au pas modéré dont ils marchaient alors, distinguer qu’il était dans un pays qui ne lui était pas inconnu.

Les bords désolés et les eaux stagnantes de la mer Morte, la chaîne de montagnes raboteuses et escarpées qui s’élevaient à gauche, le petit groupe de palmiers qui formait le seul point de verdure sur le sein de ce vaste désert, tous ces objets qu’il n’était pas possible d’oublier après les avoir vus une fois, annoncèrent à sir Kenneth qu’il approchait de la fontaine appelée le Diamant du désert, qui avait été le théâtre de son entrevue, dans une circonstance différente, avec l’émir sarrasin, Sheerkohf ou Ilderim. Quelques minutes après, ils arrêtèrent leurs coursiers auprès de la fontaine,