Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 22, 1838.djvu/216

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Le duc d’Autriche restait immobile, sombre et mécontent, les yeux fixés sur le plancher, et son front portail les traces d’un ressentiment étouffé, qu’un sentiment de timidité et d’effroi l’empêchait d’exprimer par des paroles.

Le patriarche de Jérusalem se hâta de rompre ce silence embarrassant, et de se déclarer témoin que le duc d’Autriche s’était disculpé par un serment solennel de toute connaissance directe ou indirecte de l’outrage fait à la bannière d’Angleterre.

« Alors nous n’en avons fait que plus d’injure au noble archiduc, reprit Richard, et nous lui demandons pardon de lui avoir imputé un outrage aussi lâche ; » puis il lui tendit la main de nouveau en signe de paix et d’amitié… « Mais que veut dire ceci ? le duc d’Autriche refuse notre main nue comme il a déjà refusé notre gantelet de fer ! Quoi ! ne sommes-nous digne d’être ni son camarade pendant la paix, ni son antagoniste au combat ? Eh bien, comme il lui plaira ; nous regarderons le peu de cas qu’il fait de nous comme une pénitence des torts que nous avons pu avoir envers lui dans un premier moment de vivacité, et en conséquence nous nous tiendrons quittes l’un envers l’autre. »

En disant ces mots, il s’éloigna de l’archiduc avec plus de dignité que de mépris, et l’Autrichien parut soulagé de n’avoir plus à soutenir son regard : tel un écolier pris en faute se réjouit lorsque son austère pédagogue a cessé de le regarder.

« Noble comte de Champagne… illustre marquis de Montferrat… vaillant maître des templiers, je suis ici comme un pénitent dans le confessionnal… Quelqu’un de vous a-t-il une accusation à porter contre moi, ou une réparation à en exiger ?

— Je ne vois pas sur quoi nous pourrions la fonder, répondit le marquis de Montferrat à la langue dorée, si ce n’est que le roi d’Angleterre a accaparé toute la gloire que ses alliés auraient pu espérer de remporter dans cette expédition.

— Mon accusation, puisque je suis sommé de parler, dit à son tour le grand-maître des templiers, est plus importante et plus grave que celle du marquis de Montferrat ; il paraîtra peut-être peu séant qu’un moine militaire, tel que moi, élève la voix lorsque tant de nobles princes gardent le silence ; mais il importe à toute l’armée, et non moins peut-être à l’illustre roi d’Angleterre d’entendre articuler en sa présence des charges que trop de gens sont disposés à porter contre lui en son absence. Nous louons et honorons le courage et les hauts faits du roi d’Angleterre, mais nous le voyons avec