Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 22, 1838.djvu/176

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Ce que j’ai à vous apprendre, observa sir Kenneth, intéresse le trône royal d’Angleterre, et ne peut être confié à d’autres oreilles qu’aux vôtres.

— Sortez, messieurs, » dit le roi à Neville et à de Vaux.

Le premier obéit, mais le second ne voulut pas s’éloigner de la personne du roi.

« Puisque vous avez dit que j’avais raison, » répliqua le baron de Gilsland à son souverain, « je veux être traité comme doit l’être un homme dont le jugement est juste… c’est-à-dire que j’en veux faire à ma volonté, et je ne vous laisserai pas tête-à-tête avec ce traître Écossais.

— Comment, Thomas ! » dit Richard contrarié et frappant du pied avec un léger mouvement de colère… « oses-tu craindre pour notre personne le bras d’un seul traître ?

— C’est en vain que vous froncez le sourcil et frappez du pied, mon prince, reprit de Vaux… Je n’abandonnerai point un homme encore malade et à moitié nu en présence d’un guerrier qui se porte bien, et qui est revêtu d’une armure à l’épreuve.

— Peu m’importe, dit le chevalier écossais. Ceci n’est pas un prétexte pour chercher à gagner du temps… Je parlerai en présence du baron de Gilsland : c’est un brave et fidèle chevalier.

— Il n’y a qu’une demi-heure, » répondit de Vaux avec un soupir qui exprimait un mélange de chagrin et de reproche, « j’en aurais dit autant de toi.

— Roi d’Angleterre, continua Kenneth, la trahison vous environne…

— Cela peut bien être, interrompit Richard ; je viens d’en avoir un exemple convaincant.

— Une trahison qui vous fera plus de mal que la perte de cent bannières… La… la… » Sir Kenneth hésita et prononça enfin, en baissant la voix, « lady Édith…

— Ah ! » dit le roi en se redressant tout-à-coup et lui prêtant une attention hautaine, tandis qu’il fixait d’un œil ferme le prétendu criminel. « Eh bien ! que peux-tu m’apprendre sur Édith ? Qu’a-t-elle à faire dans tout ceci ?

— Monseigneur, il est question d’un complot pour déshonorer votre royal lignage en donnant la main de lady Édith au soudan sarrasin, afin d’acheter une paix honteuse pour la chrétienté au prix d’une alliance humiliante pour l’Angleterre. »

Cette communication eut précisément l’effet contraire à celui