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Arthur de Tintagel, qui ai le droit de commander à toute la chevalerie bretonne.

— Au nom de tout ce qu’il y a de sacré, de la part de qui m’apportes-tu ce gage ? demanda le chevalier. Tâche, si tu le peux, de fixer un moment ta raison vacillante et de me dire quelle est la personne qui t’envoie, et le but réel de ton message ; prends garde à la manière dont tu vas parler, car ceci n’est pas un sujet de bouffonnerie.

— Chevalier présomptueux et indiscret, répondit le nain, que voudrais-tu savoir de plus, sinon que tu es honoré des ordres d’une princesse, et qu’un roi même vient te chercher ? Il ne nous convient pas de parlementer autrement avec toi que pour te commander, au nom et par la puissance de cette bague, de nous suivre devant celle à qui cette bague appartient. Chaque minute de retard est un crime contre l’obéissance que tu lui dois.

— Bon Nectabanus ! penses-y bien, reprit le chevalier… ma dame peut-elle savoir où je suis et quel est le devoir que je me suis engagé à remplir cette nuit ?… Sait-elle que ma vie… mais pourquoi parlerais-je de ma vie ? sait-elle, dis-je, que mon honneur tient à ce que je garde cette bannière jusqu’au point du jour, et peut-elle désirer que je la quitte même pour aller vers elle ?…. c’est impossible. La princesse veut s’amuser de son serviteur en lui envoyant un tel message ; et ce qui doit surtout me le faire croire, c’est qu’elle t’a choisi pour messager.

— Oh ! gardez cette croyance, » répliqua Nectabanus en se retournant. « Il m’importe peu que vous soyez félon ou loyal envers cette illustre dame… Ainsi, adieu !

— Arrête ! arrête ! attends un moment, je t’en conjure, dit sir Kenneth, réponds-moi à une seule question… La dame qui t’envoie est-elle près d’ici ?

— Qu’importe ? Le chevalier dévoué doit-il calculer les toises, les milles et les lieues comme le pauvre courrier qui est payé suivant la distance qu’il parcourt ? Sache cependant que la belle dame qui envoie ce gage à un indigne vassal, sans foi ni courage, n’est éloignée d’ici qu’à une portée de cette arbalète. »

Le chevalier regarda de nouveau la bague comme pour s’assurer qu’il n’y avait pas d’imposture dans ce bijou. « Dis-moi, » demanda-t-il encore au nain, « ma présence sera-t-elle requise pour un certain espace de temps ?

— De temps, » répondit Nectabanus en suivant sa veine capri-