Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 22, 1838.djvu/112

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au conseil où sa voix est si puissante ; mais, comme soldat, je dois obéir à ceux à qui le droit de commander est légitimement dévolu : la moindre hésitation serait d’un mauvais exemple dans le camp des chrétiens.

— Tu parles bien, et le blâme ne doit pas retomber sur toi, mais sur ceux avec lesquels, lorsque Dieu me fera la grâce de me relever de cette couche maudite d’inactivité et de douleur, j’espère régler mes comptes comme il faut. Tu as bien fait d’obéir ; mais quel était le but de ton message ?

— Il me semble, sous le bon plaisir de Votre Altesse, qu’il vaudrait mieux le demander à ceux qui m’en chargèrent, et qui peuvent expliquer les motifs de ma mission, tandis que je ne puis rendre compte que de son but et de sa forme extérieure.

— Pas de détours avec moi, sire Écossais ; tu pourrais t’en trouver mal.

— M’en trouver mal, milord ! je suis devenu inaccessible à toute crainte de ce genre depuis que je me suis voué à cette sainte entreprise, songeant plutôt à ma félicité éternelle qu’à mon enveloppe terrestre.

— Par la messe, tu es un brave ! Écoute, sire chevalier, j’aime les Écossais : ils sont vaillants, quoique entêtés et bourrus, et je les crois aussi pleins de loyauté, quoique des raisons de politique les forcent quelquefois à dissimuler. Je mérite bien aussi quelque reconnaissance de leur part, car j’ai fait volontairement ce qu’ils n’auraient pu arracher par les armes, ni à moi, ni à mes prédécesseurs. J’ai reconstruit les forteresses de Roxburg et de Berwick qui sont données en otage à l’Angleterre ; je vous ai rendu vos anciennes limites, et enfin j’ai renoncé au droit d’hommage qui me semblait injustement exigé. J’ai cherché à me faire des amis libres et indépendants dans un pays où les anciens rois d’Angleterre avaient cherché seulement à soumettre des vassaux rebelles et toujours mécontents.

— Vous avez fait tout cela, milord, » dit sir Kenneth en s’inclinant, « vous avez accompli tout cela par votre loyal traité avec notre souverain à Cantorbéry, C’est pourquoi, moi et d’autres Écossais qui valaient mieux que moi, sommes venus combattre sous vos bannières, au lieu de ravager vos frontières d’Angleterre. Si le nombre en est maintenant peu considérable, c’est qu’ils n’ont pas ménagé leurs jours, et qu’il en a péri beaucoup.