Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 22, 1838.djvu/111

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« Ne vous en déplaise, milord, dit l’Écossais, il faut que Votre Majesté nous accorde quelque indulgence sur ce point, à nous autres pauvres gentilshommes d’Écosse. Nous sommes loin de notre pays, nos revenus sont modiques, et ils ne peuvent nous soutenir comme vos opulents seigneurs qui ont crédit chez les Lombards. Les Sarrasins n’en sentiront que mieux nos coups si nous pouvons ajouter de temps en temps à nos racines et à nos gâteaux d’orge un morceau de venaison séché.

— Il n’est pas besoin de me demander mon agrément, puisque Thomas de Vaux qui, comme tous ceux qui m’entourent, ne manque jamais de faire ce qui lui convient, t’a déjà donné la permission de chasser au courre et au vol.

— Au courre seulement ; mais s’il plaisait à Votre Majesté de m’accorder le privilège de chasser au vol en outre, et qu’elle voulût me confier un faucon sur le poing, je me flatte de pouvoir fournir la table de Votre Majesté de quelques oiseaux aquatiques bien choisis.

— Merci de moi ! si tu avais le faucon, je crois que tu n’attendrais guère la permission. On dit pourtant, ce me semble, que nous autres descendants de la maison d’Anjou nous sommes aussi offensés des délits contre nos lois forestières que des attentats contre notre couronne. À de braves et vaillants hommes nous pourrions pardonner l’un et l’autre de ces crimes… Mais assez sur ce sujet. Je désire savoir, sire chevalier, dans quel but et par l’ordre de qui vous venez de faire un voyage au désert de la mer Rouge, et à Engaddi ?

— Par ordre du conseil des princes de la sainte croisade.

— Et comment quelqu’un a-t-il osé donner un tel ordre, tandis que moi qui, sûrement, ne suis pas le dernier dans cette ligue, n’en étais pas seulement informé ?

— Ce n’était pas à moi, n’en déplaise à Votre Altesse, de faire des questions sur ce point. Je suis un soldat de la croix, servant, sans doute, en ce moment sous la bannière de Votre Altesse, et fier qu’un tel honneur me soit accordé ; mais cependant celui qui a pris le symbole sacré, et qui s’est engagé à combattre pour les droits du christianisme et la délivrance du Saint-Sépulcre, s’est obligé à obéir sans hésiter aux ordres des princes et des chefs par qui la sainte entreprise est dirigée. Je dois regretter, avec toute la chrétienté, qu’une indisposition qui, j’espère, ne sera que passagère, ait privé momentanément Votre Altesse de la faculté d’assister