Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 22, 1838.djvu/103

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courage était tempéré par un intérêt vif et puissant pour sa sûreté personnelle ; il se rappela cependant la nécessité où il était de juger par lui-même de la science du médecin arabe, et entra dans la hutte avec une dignité de manières faite, suivant lui, pour inspirer le respect à l’étranger.

Le prélat avait réellement un aspect imposant et remarquable. Dans sa jeunesse, il avait été fort beau, et, dans un âge avancé, il tenait à ne pas le paraître moins. Son costume épiscopal était du genre le plus magnifique, garni de riches fourrures, et couvert d’une chape qui offrait un travail d’aiguille précieux. Les bagues qui ornaient ses doigts valaient une belle baronnie, et son capuchon, alors rejeté en arrière à cause de la chaleur, avait des agrafes d’or pur pour l’attacher, quand il voulait, autour de son cou et sous son menton. Sa longue barbe, blanchie par les années, tombait jusque sur sa poitrine. Un des jeunes acolytes qui l’accompagnaient lui procurait une ombre artificielle, suivant la coutume d’Asie, en tenant sur sa tête un parasol de feuilles de palmier, tandis que l’autre rafraîchissait son révérend maître en agitant devant lui un éventail de plumes de paon.

Quand l’évêque de Tyr entra dans la hutte du chevalier écossais, le maître en était absent, et le médecin maure qu’il venait voir était assis dans la même posture où de Vaux l’avait laissé plusieurs heures auparavant, les jambes croisées sur une natte de feuillage, auprès du malade, qui paraissait dormir profondément, et dont il tâtait le pouls de temps en temps. L’évêque resta debout devant lui deux ou trois minutes, comme s’il attendait quelque salutation respectueuse, ou comme s’il espérait du moins voir le Sarrasin frappé de la majesté de sa présence. Mais Adonebec ne lui accorda d’autre attention qu’un regard rapide, et quand le prélat à la fin le salua dans la langue franque, il ne lui répondit que par le salut oriental ordinaire, « Salam alicum ! la paix soit avec vous !

— Es-tu médecin, infidèle ? » dit l’évêque un peu mortifié de la froideur de son accueil : « Je voudrais parler avec toi sur ton art.

— Si tu entendais quelque chose à la médecine, répondit El Hakim, tu saurais que les médecins ne doivent entreprendre aucune discussion, aucune consultation dans la chambre de leur malade. Écoute, » ajouta-t-il, comme le grondement sourd du chien se faisait entendre de l’autre partie de la hutte, « ce chien lui-même te donne une leçon. Uléma, son instinct lui enseigne qu’il