Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/441

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aux prêtres de Saint-Sauveur, cette belle église où les dépouilles des temples païens avaient contribué à atteindre la magnificence de l’édifice chrétien. La vaste nef fut splendidement éclairée, et les funérailles se firent avec toute la splendeur que put déployer la ville d’Aix. Les papiers de la reine examinés, on trouva que Marguerite, en disposant de ses bijoux et en vivant avec économie, s’était procuré les moyens d’assurer des pensions décentes au très petit nombre d’Anglais qui l’avaient suivie jusqu’à sa mort. Son collier de diamants, que, dans l’acte de ses dernières volontés, elle disait être entre les mains d’un marchand nommé John Philipson ou de son fils Arthur Philipson, elle le donnait, ou le prix qu’ils en avaient tiré, s’ils l’avaient vendu ou engagé, aux susdits John Philipson et Arthur Philipson son fils, avec l’obligation d’en employer la valeur à la poursuite du dessein qu’ils travaillaient à exécuter, ou si la chose devenait impossible, à leur propre usage et profit. Le soin de ses funérailles était entièrement confié audit Arthur Philipson, avec prière qu’elles fussent absolument dirigées d’après les formes suivies en Angleterre : cette recommandation était exprimée dans une addition faite au testament principal, et signée du jour même de sa mort.

Arthur se hâta d’envoyer tout exprès Thibaut vers son père, avec une lettre où il lui expliquait en termes qu’il savait devoir être compris le résumé de tous les événements survenus depuis son arrivée dans la ville d’Aix, et surtout la mort de la reine Marguerite. Enfin il lui demandait des instructions sur la route qu’il aurait à suivre pour le rejoindre, attendu que le délai nécessaire qui précédait les obsèques d’une personne de si haut rang devait le retenir à Aix jusqu’à ce qu’il pût les recevoir.

Le vieux roi supporta si aisément le coup que lui porta la mort de sa fille que, le second jour après l’événement, il s’occupa d’arranger une pompeuse procession pour les funérailles, et de composer une élégie en l’honneur de la défunte reine, qui était comparée aux déesses de la mythologie païenne, ainsi qu’à Judith, à Débora et à toutes les autres saintes femmes de l’Écriture, pour ne point parler de celles de création chrétienne. On ne peut dissimuler que, quand le premier accès de douleur fut passé, le roi René ne put s’empêcher de reconnaître que la mort de Marguerite tranchait un nœud politique qu’autrement il aurait eu grand’peine à délier, et lui permettait de se déclarer ouvertement pour son petit-fils ; et il alla jusqu’à lui compter une partie considérable des