Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/379

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vos déserts aussi vite que vos pieds vous y pourront conduire. À notre première rencontre, vous saurez mieux qui vous avez offensé… Qu’on apprête notre cheval… la séance est levée. »

Le maire de Dijon, à l’instant où tout le monde était en mouvement pour quitter la salle, s’approcha encore du duc, et exprima timidement l’espérance que Son Altesse daignerait accepter un banquet que les magistrats avaient préparé, dans l’attente qu’il leur ferait un pareil honneur.

« Non, par saint George de Bourgogne ! seigneur maire, » répondit Charles, avec un de ces regards terrassants par lesquels il avait coutume d’exprimer son indignation mêlée au dédain… « nous n’avons pas été assez satisfait de notre déjeuner pour être disposé à confier à la loyauté de notre bonne ville de Dijon le soin de notre dîner. »

En parlant ainsi, il tourna brusquement le dos au magistrat mortifié, et montant à cheval, il revola à son camp, s’entretenant d’une manière très vive avec le comte Campo-Basso durant le chemin.

« Je vous offrirais bien à dîner, milord d’Oxford, » dit Colvin au noble exilé quand il mit pied à terre devant sa tente ; « mais je prévois qu’avant qu’il vous soit possible de manger une bouchée, vous serez mandé en présence du duc, car c’est l’habitude de notre Charles, quand il a pris une mauvaise résolution, de discuter avec ses amis et conseillers pour leur prouver qu’elle est bonne. Pardieu ! il fait toujours un prosélyte de ce souple Italien. »

L’augure de Colvin fut promptement réalisé ; car un page vint presque aussitôt avertir le marchand anglais Philipson de se rendre auprès du duc. Sans attendre un instant, Charles s’abandonna à une série incohérente de reproches contre les États de son duché, qui lui refusaient leur appui dans une affaire si peu importante, et s’étendit en longues explications sur la nécessité où il se trouvait de punir l’audace des Suisses. « Et toi aussi, Oxford, » dit-il en terminant, « ton impatience est-elle poussée au point de souhaiter que je m’engage dans une guerre lointaine avec l’Angleterre, et que je transporte mes forces au delà des mers, quand j’ai de si insolents rebelles à châtier sur mes frontières ? »

Quand il cessa enfin de parler, le comte anglais lui exposa avec une chaleur respectueuse le danger qu’il semblait devoir courir, en luttant contre un peuple pauvre, il est vrai, mais universellement redouté pour sa discipline et son courage, et encore sous