Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/347

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agitation, ses larges sourcils abaissés sur ses yeux, les points fermés et grinçant des dents jusqu’à ce qu’enfin il semblât prendre une résolution. Il agita une sonnette d’argent qui se trouvait sur la table. — Ici, Contay, » dit-il au gentilhomme de sa chambre qui entra, « ces drôles de montagnards sont-ils exécutés ? — Non : puisse ne pas s’en fâcher Votre Altesse : mais l’exécuteur attend que le prêtre ait fini de les confesser, — Qu’ils vivent ! dit le duc. Nous entendrons demain de quelle manière ils se proposent de justifier leur conduite à notre égard. »

Contay s’inclina et sortit ; alors se tournant vers l’Anglais, le duc dit avec un mélange indicible de hauteur, de familiarité et même de bonté, mais le front déridé et le regard calme : « Nous sommes maintenant quittes d’obligations, milord d’oxford… vous avez obtenu vie pour vie… même pour compenser la différence qui peut exister entre les marchandises que nous échangeons, vous avez obtenu six vies pour une. Je ne vous donnerai donc plus la moindre attention quand vous me rappellerez encore le faux pas de mon cheval à Montlhéry, ou vos services en cette occasion. La plupart des princes se contentent de haïr en secret les hommes qui leur ont rendu de ces services extraordinaires… ce ne sont pas là mes sentiments, seulement il m’est désagréable qu’on me rappelle que j’en ai eu beson. Hum ! je suis à demi suffoqué des efforts qu’il m’a fallu faire pour changer les résolutions que j’avais déjà arrêtées. Holà ! ho ! quelqu’un !… qu’on me serve à boire ! »

Un huissier entra portant un large flacon d’argent, qui, au lieu de vin, était rempli de tisane, légèrement parfumée d’herbes aromatiques.

« Je suis par nature si violent et si colère, dit le duc, que mes médecins me défendent de boire du vin. Mais vous, Oxford, vous n’êtes pas tenu à suivre un tel régime. Allez trouver votre compatriote Colvin, général de notre artillerie. Nous vous recommandons à sa garde et à son hospitalité jusqu’à demain, qui doit être un jour d’occupation, car je m’attends à recevoir la réponse des benêts de l’assemblée des États réunis à Dijon, et j’ai aussi à entendre, grâce à l’intercession de Votre Seigneurie, ces misérables députés suisses, comme ils s’appellent. Eh bien ! n’en parlons plus… Bonne nuit… Vous pouvez causer en toute liberté avec Colvin, qui est, comme vous, un vieux lancastrien… Mais, écoutez bien, pas un mot touchant la Provence… pas même durant votre sommeil… Contay, conduisez ce gentilhomme anglais à la tente de Colvin, qui