Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/341

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les joyaux dont Votre Grâce connaît la valeur, jusqu’à ce qu’elle vous ait rendu la somme que votre amitié peut lui avancer dans le besoin où elle se trouve. — Ah ! ah ! dit le duc, notre cousine voudrait-elle faire de nous un prêteur sur gage et nous mettre dans le cas d’agir à son égard comme un usurier juif à l’égard de son débiteur ?… Oui, en vérité ; pourtant, je puis avoir besoin de ces diamants, car si cette affaire était faisable plus tard, il serait possible qu’il me fallût emprunter moi-même pour obvier au manque d’argent de ma cousine. Je me suis adressé aux États du duché qui sont assemblés en ce moment, et j’attends d’eux, comme de juste, un bon subside. Mais j’ai là des têtes turbulentes et des mains serrées : je puis donc me trouver sans mailles ni sous… En attendant, mettez vos joyaux sur la table… bien, admettons que ma bourse ne doive pas souffrir par suite de la prouesse de chevalier errant que vous me proposez, encore les princes ne s’engagent-ils pas dans une guerre sans quelque espoir d’avantage ? — Écoutez-moi, noble souverain, vous êtes naturellement ambitieux d’unir les grands États de votre père et ceux que vous avez acquis par la force des armes, en un duché ferme et compacte… — Dites en un royaume, interrompit Charles, le mot est plus propre. — En un royaume dont la couronne reposera aussi belle, aussi brillante sur le front de Votre Altesse, que celle de France sur la tête de votre suzerain actuel, le roi Louis. — Il ne fallait pas tant de finesse que vous en avez pour voir que tel est mon dessein ; autrement, pourquoi serais-je ici le casque en tête et l’épée au côté ; et pourquoi mes troupes occuperaient-elles les places fortes de la Lorraine, chasseraient-elles devant soi le mendiant de Vaudemont, qui à l’insolence de réclamer cette province comme un héritage ? Oui, mon ami, l’agrandissement de la Bourgogne est un motif qui fera toujours combattre le duc de ce beau domaine, tant qu’il pourra mettre le pied dans l’étrier. — Mais ne pensez-vous pas, dit le comte anglais, puisque vous me permettez de vous parler avec franchise, du ton d’une vieille connaissance ; ne pensez vous pas que sur cette carte de vos domaines, du reste si bien bornés, il y a quelque chose vers la frontière du sud qui pourrait être arrangé plus avantageusement pour un roi de Bourgogne ? — Je ne devine pas où vous en voulez venir, » répondit le duc en regardant un plan de son duché et de ses autres possessions, vers lequel l’Anglais avait attiré son attention ; puis tournant son grand œil vif sur la figure du comte banni :

« Je voulais vous dire, répliqua celui-ci, que, pour un prince