Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/280

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vous souhaiterez un jour vous-mêmes qu’on vous écoute ! Je dis que telle était mon opinion, et je l’exprimai comme je viens de le faire… Je dis encore que j’avais le droit d’exprimer mes sentiments, justes ou erronés, dans un pays neutre où te tribunal ne prétendait, ne pouvait prétendre à aucune juridiction. Mes sentiments n’ont pas changé. Je les proclamerais encore, quand je verrais cette épée sur mon sein, ou cette corde autour de mon cou. Mais je nie avoir jamais parlé contre les institutions de votre vèhme dans un pays où elles étaient en exercice comme moyen national de rendre la justice. Je repousse encore plus fortement, s’il est possible, et comme une grossière absurdité, le mensonge qui me représente moi, voyageur errant, comme chargé de traiter ces hautes matières avec le duc de Bourgogne, ou de former une conspiration pour détruire un système auquel tant de personnes semblent être chaudement attachées. Je n’ai jamais rien dit, rien pensé de semblable. — Accusateur, dit le juge-président, tu as entendu l’accusé… Quelle est ta réplique ? — La première partie de l’accusation, il l’a avouée en présence de cette auguste assemblée, dit l’accusateur, savoir que sa langue perverse a calomnié nos saints mystères ; c’est pourquoi il mérite qu’on la lui arrache du gosier. Je vais moi-même par mon serment d’office, comme l’ordonne l’usage et la loi, déclarer que le reste de l’accusation, savoir qu’il s’est rendu coupable d’avoir tramé des complots pour l’anéantissement de nos institutions véhmiques, est aussi vrai que la partie qu’il lui a été impossible de nier. — En justice, répliqua l’Anglais, l’accusation si elle n’est pas appuyée de preuves satisfaisantes, doit permettre à l’accusé de prêter serment en sa propre faveur, au lieu de permettre à celui qui accuse de fortifier par son témoignage la faiblesse de son accusation. — Étranger, répondit le juge-président, nous permettons à ton ignorance une défense plus longue et plus complète que ne l’autorisent nos formes ordinaires. Sache que le droit de siéger parmi ces vénérables juges confère à la personne qui en est investie un caractère sacré auquel les hommes ordinaires ne peuvent atteindre. Le serment d’un des initiés doit contrebalancer les plus solennelles assurances de tous ceux qui ne connaissent pas nos saints secrets. Dans la cour véhmique tout doit être véhmique. La déclaration de l’empereur, s’il n’était pas initié, n’aurait pas autant de poids dans nos délibérations que celle du plus subalterne de nos officiers. L’affirmation de l’accusateur ne peut être contredite que par le serment d’un membre du même tribunal, et d’un rang supérieur.