Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/227

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raison de l’être, puisque, pour toute explication, il présenta à Philipson le collier de diamants avec la cassette dans laquelle il était contenu.

« Cette jolie chose vous appartient, dit-il ; j’ai appris de votre fils Arthur qu’elle était à vous, et que vous seriez content de la retrouver. — Je vous remercie très cordialement, répliqua l’Anglais. Ce collier m’appartient véritablement, c’est-à-dire le paquet dont il formait le contenu était confié âmes soins ; et le prix que j’y attache en ce moment dépasse de beaucoup sa valeur réelle, puisqu’il me sert de titre et de gage pour l’accomplissement d’une importante mission… Et comment, mon jeune ami, » continua-t-il en s’adressant à Sigismond, » avez-vous été assez heureux pour rencontrer un objet que nous avions jusqu’à présent cherché en vain ? Permettez-moi de vous exprimer ma reconnaissance, et ne me trouvez pas trop curieux si je vous demande comment ce collier vous est venu entre les mains. — Quant à cela, répondit Sigismond, l’histoire n’est pas longue. Je m’étais approché de l’échafaud le plus possible, attendu que je n’avais encore jamais vu d’exécution, et j’aperçus l’exécuteur (qui me semble avoir rempli son office avec toute l’adresse imaginable), au moment même où il jetait un drap sur le cadavre d’Hagenbach, tirant quelque chose de la poitrine du mort et le glissant rapidement dans la sienne : aussi, quand le bruit circula qu’il manquait un objet de prix, je me hâtai de courir après le drôle. J’appris en route qu’il avait commandé pour cent couronnes de messes au maître-autel de Saint-Paul, et je parvins à le découvrir dans la taverne de la ville, où quelques hommes de mauvaise mine buvaient gaîment à sa santé comme citoyen libre et homme noble. Je m’élançai alors au milieu du groupe avec ma pertuisane, et demandai à Sa Seigneurie si elle voulait me remettre ce qu’elle avait dérobé, ou tâter du poids de l’arme que je portai ? Sa Seigneurie, monseigneur le bourreau, hésita et voulut me faire une querelle. Mais je lui réitérai péremptoirement mes injonctions, et il jugea alors plus convenable de me rendre ce paquet que vous trouverez, je l’espère, seigneur Philipson, aussi intact que lorsqu’on vous le déroba… Et… et… je les laissai achever leur festin… et voilà toute l’histoire. — Tu es un brave garçon ! dit Philipson, et avec un cœur toujours droit, la tête peut rarement faire mal. Mais l’Église ne perdra rien de ses droits, et je me charge, avant de quitter La Ferette de payer les messes que l’homme a commandées pour le repos de l’âme d’Hagenbach, si inopinément arraché de ce monde. »