Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/152

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

car si vous ne songez plus à l’institutrice en voyant la beauté de la jeune vierge, vous serez enseveli avec votre épée et votre écu comme dernier rejeton mâle de votre maison ; et d’autres malheurs, croyez-moi, s’ensuivront encore, car de telles alliances n’amènent jamais un heureux résultat, et j’en suis moi-même un exemple… Mais, silence ! on nous observe. »

« Les domestiques du château d’Arnheim, dont les objets de distraction n’étaient pas fort nombreux, remarquaient avec d’autant plus d’attention ceux qu’ils pouvaient rencontrer ; et quand approcha le terme auquel le Persan devait cesser de recevoir l’hospitalité au château, grand nombre d’entre eux, sous différents prétextes, dont la frayeur était le mobile secret, allèrent se cacher, tandis que les autres se tinrent dans l’attente de quelque catastrophe singulière et terrible. Rien de tel n’arriva pourtant ; et au jour déterminé, bien avant l’heure fatale de minuit, Dannischemend termina sa longue visite au château d’Arnheim en sortant à cheval par la porte, comme un voyageur ordinaire. Le baron avait cependant pris congé de son maître avec de nombreuses marques de regret et même du plus vif chagrin. Le sage Persan le consola en lui parlant à voix basse et long-temps ; mais on n’entendit que la fin de ses paroles : « Au premier rayon du soleil elle sera avec vous. Soyez bienveillant pour elle, mais avec une grande réserve. » Il partit alors, et depuis il ne fut jamais question de lui dans les environs d’Arnheim.

« On remarqua que le baron, durant tout le jour du départ de l’étranger, fut d’une excessive mélancolie. Il resta, contre sa coutume, dans le grand salon, et ne visita ni la bibliothèque ni le laboratoire, où il ne pouvait plus jouir de la compagnie de son ancien instituteur. À la pointe du jour suivant, sire Herman appela son page, et contrairement à son habitude, qui était plutôt de s’habiller avec négligence, il mit à sa parure le plus grand soin ; et, comme il était dans le printemps de la vie et d’une noble figure, il avait raison d’être satisfait de son extérieur. Sa toilette finie, il attendit que le soleil se montrât au dessus de l’horizon, et alors, prenant sur la table la clef du laboratoire, que le page croyait y être restée toute la nuit, il se dirigea vers ce lieu, suivi de son serviteur. À la porte, le baron s’arrêta et sembla tout-à-coup hésiter, d’abord s’il ne renverrait pas le page, ensuite s’il ouvrirait la porte, comme eût fait une personne qui se serait attendue à trouver quelque chose d’extraordinaire en dedans, il persista dans sa résolu-