Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/128

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

faut pas perdre ta réputation à ton vieil âge… flaire encore. »

Le chien leva la tête, flaira l’air autour de lui, comme s’il comprenait ce qu’avait dit son maître, puis remua la tête et la queue, comme pour lui répondre.

« À la bonne heure, t’y voilà à présent, » dit Donnerhugel, passant sa main sur le dos de l’animal ; « les secondes pensées valent de l’or ; tu vois donc que ce n’est qu’un ami ? »

Le chien agita encore la queue, et se remit en marche aussi tranquillement qu’auparavant. Rudolphe revint à sa place, et son compagnon lui dit :

« Nous allons bientôt rencontrer Rudiger et nos camarades, je suppose, et le chien entend le bruit de leurs pas avant que nous puissions l’entendre. — Il est difficile que ce soit déjà Rudiger, répondit le Bernois ; sa ronde autour du château est d’une circonférence plus vaste que la nôtre… Quelqu’un approche pourtant, car Wolf-Fanger s’émeut de nouveau… Regardez bien de tous les côtés. »

Lorsque Rudolphe donna ainsi l’alerte à toute sa petite troupe, elle entrait dans une vaste clairière où l’on apercevait à une distance considérable les uns des autres quelques vieux pins d’une grandeur gigantesque, qui paraissaient encore plus hauts et plus noirs que de coutume, car leurs larges cimes noires et leurs branches dépouillées se détachaient à merveille sur un ciel pur, éclairé par les rayons blanchâtres de la lune. « Ici du moins, dit le Suisse, nous aurons l’avantage de voir clairement approcher l’ennemi. Mais je pense, » ajouta-t-il, après avoir regardé pendant une minute, « ce n’est qu’un loup ou un daim qui a traversé notre route, et l’odeur trouble le chien… Holà ! arrêtez !… oui, c’est cela ; il va en avant. »

Le chien s’avança en effet, après avoir donné quelque signe de doute, d’incertitude et même de crainte. Il est probable néanmoins qu’il se réconcilia avec l’objet qui l’avait d’abord inquiété, puisqu’il reprit encore une fois sa démarche ordinaire.

« C’est singulier ! dit Arthur Philipson ; et il me semble que j’ai aperçu quelque chose près de ce buisson, où des pieds d’aubépine et de noisetiers entourent, autant que j’en puis juger, les troncs de quatre ou cinq gros arbres. — Mes yeux se sont arrêtés sur ce même buisson plus de cinq minutes, et je n’ai rien vu, dit Rudolphe. — Eh bien, moi, répondit le jeune Anglais, j’ai vu remuer un objet, quel qu’il soit, pendant que vous ne vous occupiez que de vo-