Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/57

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chant sur les poutres qui recouvraient ma chambre : car elle n’était point plafonnée, comme vous pouvez croire. La lumière, passant à travers les planches mal jointes, devint visible dès que ma lampe fut éteinte ; et comme le bruit des pas lents, solennels et réguliers, continuait toujours, comme je pus distinguer que la personne revenait sur ses pas lorsqu’elle arrivait à un des bouts de la pièce, il me parut évident que le marcheur ne se livrait pas à une occupation domestique, mais se promenait tout simplement de long en large pour son plaisir : singulier amusement, pensai-je, pour un homme qui s’est livré à un violent exercice une partie au moins du jour précédent, et qui parle de se lever le lendemain au point du jour.

Cependant j’entendais la tempête qui, menaçante pendant la soirée, commençait à prendre sa revanche ; un bruit, pareil à un tonnerre lointain, celui sans doute des vagues qui se brisaient contre la côte, se mêlait au rugissement d’un torrent voisin et au froissement plaintif des arbres de la vallée, tourmentés par l’ouragan. Dans la maison, les croisées criaient, les portes battaient, et les murs, quoique assez solides pour une construction de cette espèce, semblaient vaciller dans la tempête.

Au milieu du fracas des éléments furieux, les pas pesants de l’homme qui se promenait au-dessus de ma tête se faisaient entendre distinctement. Je crus même l’entendre gémir ; mais j’avoue franchement que, dans cette situation extraordinaire, mon imagination peut m’avoir abusé. Je fus tenté plusieurs fois d’appeler, et de demander si l’orage qui grondait autour de nous ne pourrait pas renverser la maison ; mais, lorsque je songeai au maître sauvage et peu sociable de cette demeure, qui semblait éviter la compagnie des hommes et rester imperturbable au milieu de la guerre des éléments, lui parler en ce moment me paraissait une tâche aussi terrible que de m’adresser à l’esprit de la tempête lui-même : un autre être, à mon idée, n’aurait pu demeurer calme et tranquille pendant cet épouvantable tumulte.

Avec le temps, la fatigue l’emporta sur l’inquiétude et la curiosité. La tempête diminua, ou du moins mes sens s’y habituèrent, et je m’endormis, avant que les pas mystérieux de mon hôte eussent cessé d’ébranler le plafond sur ma tête.

On aurait pu penser que la nouveauté de ma situation, tout en n’éloignant pas de moi le sommeil, en aurait au moins dimi-