Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/493

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jour, et qu’enfin il mourut inopinément de ce que mon donneur de renseignements appelait « une attaque de perplexité, » sur une proposition d’arrangement à lui faite dans le vestibule du palais. J’ai préféré conserver l’expression même de mon procureur, ne pouvant déterminer au juste si c’est une corruption du mot apoplexie, comme le suppose mon ami M. Oldbuck, ou le nom de quelque maladie particulière aux personnes qui ont affaire dans les cours de justice, de même que beaucoup d’états et de professions ont leur pathologie spéciale. Le même procureur se rappelait aussi l’aveugle Willie Steenson qu’on appelait Willie le voyageur, et qui termina tranquillement ses jours dans la maison de sir Arthur Redgauntlet. « Il avait rendu, disait mon homme de loi, un grand service à cette famille, un jour surtout qu’un militaire du comté d’Argyle était venu surprendre une troupe de grands personnages, qui conservaient encore le vieux levain en eux. Et cet officier n’aurait pas manqué de leur mettre la main sur le collet pour les faire tous pendre ou décapiter. Mais Willie et un ami qu’il avait, nommé Robin le rôdeur, en jouant des airs tels que « Voici les Campbell qui viennent ! » et d’autres semblables, surent les avertir à temps, de sorte qu’ils purent décamper. » Je n’ai pas besoin de vous faire remarquer, car vous avez l’esprit assez fin pour le voir, mon digne monsieur, que ces détails, bien qu’incorrects, semblent avoir rapport aux événements qui paraissent si fort vous intéresser.

Quant à Redgauntlet, sur l’histoire subséquente duquel vous demandez des détails plus circonstanciés, j’ai appris d’une personne vénérable qui était prêtre dans le monastère écossais de Ratisbonne avant sa suppression, que cet ardent jacobite resta deux ou trois ans dans la famille du Chevalier, et qu’il ne le quitta à la fin que par suite de discordes intérieures, survenues dans cette malheureuse maison. Comme il en a instruit le général Campbell, il est allé s’enfermer dans le cloître ci-dessus désigné, et a déployé, pendant la dernière partie de sa vie, un grand zèle à s’acquitter des devoirs de la religion qu’il avait beaucoup trop négligés autrefois, ne s’occupant que de manœuvres et d’intrigues politiques. Il parvint à la dignité de prieur dans la maison à laquelle il appartenait, et qui était d’un ordre très-sévère. Il recevait parfois les visites de ses compatriotes que le hasard amenait à Ratisbonne, et que la curiosité poussait à visiter son monastère. On remarqua qu’à la vérité il écoutait avec intérêt et