Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/325

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vait pu remarquer, car les chandelles ne répandaient encore qu’une lumière imparfaite. Le jeune et imprudent voyageur resta donc seul dans la pièce où il avait été conduit par un si singulier chemin.

Dans cette situation, le premier soin d’Alan fut d’examiner avec attention le lieu où il se trouvait : en conséquence, après avoir mouché les lumières, il fit à pas lents le tour de l’appartement, examinant les meubles et les dimensions. Il lui sembla que c’était une petite salle à manger, comme on en trouve d’ordinaire dans les maisons des artisans et des boutiquiers qui jouissent d’une certaine aisance ; à l’extrémité était un petit buffet, et tout l’ameublement n’avait rien de remarquable. Il découvrit une porte qu’il tâcha d’ouvrir, mais elle était fermée en dehors. Une autre porte pratiquée dans le même côté de l’appartement lui donna entrée dans un cabinet garni de tablettes, sur lesquelles étaient des bols à punch, des verres, des tasses à thé, et d’autres objets semblables ; à un clou était suspendue une grande redingote d’une étoffe très-grossière, avec deux pistolets d’arçon qui sortaient de la poche, et par terre étaient de grosses bottes, telles qu’on en portait à cette époque, du moins pour les longs voyages.

Peu satisfait de cette découverte, Alan Fairford ferma la porte, et continua sa ronde le long des murailles de l’appartement, pour découvrir par où Job Rutledge avait disparu. Mais le passage secret était trop habilement caché, et le jeune avocat n’eut rien de mieux à faire qu’à réfléchir sur la singularité de sa situation présente. Il savait depuis long-temps que les lois sur la douane avaient occasionné entre l’Écosse et l’Angleterre un commerce actif de contrebande qui existait alors, comme aujourd’hui, et qui continuera d’exister jusqu’à l’abolition complète du misérable système qui établit une inégalité de droits entre les différentes parties du même royaume : système qui, soit dit en passant, ressemble beaucoup à la conduite d’un athlète qui se lierait un bras pour mieux combattre avec l’autre. Mais Fairford ne pensait pas que pour faire ce trafic illicite il y eût des établissements aussi étendus et aussi réguliers ; il n’aurait jamais pu concevoir que le profit pût être assez considérable pour permettre de construire des bâtiments si vastes, avec tous ces longs corridors servant aux communications secrètes. Il songeait à toutes ces circonstances, non sans quelque inquiétude sur la continuation de son voyage, lorsque tout à coup, levant les yeux, il aperçut à l’extrémité de l’ap-