Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/265

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— Aussi bien, dis-je, et aussi peu ; car vous ne pouvez estimer au véritable taux ni leur mérite ni le mien. Je sais que vous les avez vus la dernière l’ois que vous êtes allé à Édimbourg.

— Ah ! » s’écria-t-il, et il fixa sur moi des yeux perçants.

« C’est la vérité, dis-je, vous ne pouvez le nier ; et maintenant que je vous ai ainsi montré qu’il ne m’a pas été impossible de connaître vos mouvements, permettez de vous avertir que j’ai des moyens de communication absolument ignorés de vous. Ne m’obligez pas à m’en servir à votre préjudice.

— À mon préjudice ! répliqua-t-il. Jeune homme, vous me faites rire, et je vous pardonne votre folie. Même je vous dirai une chose dont vous ne vous doutez pas : ce fut par des lettres reçues de ces Fairford que je soupçonnai pour la première fois (soupçon confirmé par la visite que je leur rendis) que vous étiez l’individu que je cherchais depuis tant d’années.

— Si vous l’avez appris par les papiers que je portais sur moi durant la nuit où je fus obligé de devenir votre hôte à Brokenburn, je n’envie pas votre indifférence sur les moyens de vous procurer des renseignements. C’est un déshonneur que…

— Paix, jeune homme, » s’écria Herries, mais avec plus de calme que je ne m’y étais attendu ; « le mot déshonneur ne doit pas être prononcé dans la même phrase que mon nom. Votre portefeuille était dans la poche de votre habit : il n’échappa point à la curiosité d’un autre, quoiqu’il eût été sacré pour la mienne. Mon domestique, Cristal Nixon, ne me communiqua ces informations qu’après votre départ. Je fus mécontent de la manière dont il avait obtenu ces renseignements ; mais il n’en était pas moins de mon devoir de m’assurer s’ils étaient certains, et je me rendis dans cette intention à Édimbourg. J’espérais persuader à M. Fairford d’entrer dans mes vues ; mais je le trouvai trop imbu de préjugés pour me confier à lui. C’est un misérable et timide esclave du gouvernement qui pèse honteusement sur notre malheureuse patrie ; et il n’aurait été ni avantageux ni sûr de lui apprendre le secret ou du droit que je possède de diriger vos actions, ou de la manière dont je me propose de l’exercer. »

J’étais décidé à profiter de son humeur communicative, et à obtenir, s’il était possible, plus de lumière sur ses intentions. Il semblait facile de le piquer sur le point d’honneur, et je résolus de tirer parti, mais avec précaution, de sa susceptibilité sur ce sujet. « Vous dites, répliquai-je, que vous n’aimez pas les ma-