Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/255

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à jouer ce rôle dangereux. Je savais, au reste, que, sur toute la frontière de l’Ouest, en Angleterre comme en Écosse, il existe encore tant d’individus qui n’ont pas prêté serment, qu’un homme fidèle à l’ancienne dynastie peut y demeurer en toute sûreté, à moins que le gouvernement n’attache une importance toute particulière à s’assurer de sa personne ; et encore, dans ce cas, trouve-t-il souvent moyen d’échapper, soit grâce à un avis donné à temps, soit, comme dans le cas de M. Foxley, par suite de la répugnance des magistrats de province à intervenir dans ce qui est maintenant regardé comme une poursuite haineuse contre des infortunés.

Cependant, à en croire les bruits qui ont couru depuis peu, l’état actuel de la nation, ou tout au moins celui de quelques provinces mécontentes, agitées par une multitude de motifs, mais particulièrement par l’impopularité de l’administration, peut sembler à cette espèce d’agitateurs une occasion favorable de recommencer leurs intrigues. D’un autre côté, le gouvernement ne peut, dans un pareil instant de crise, être disposé à regarder de pareils hommes avec le mépris qui aurait été pour eux, quelques années auparavant, une punition très-convenable.

Qu’il se trouve des hommes assez téméraires pour sacrifier leurs intérêts et leur vie à une cause désespérée, ce n’est pas une chose nouvelle dans l’histoire : elle abonde en exemples d’un pareil dévouement. Que M. Herries soit un de ces enthousiastes, c’est un fait non moins certain, mais tout cela n’explique pas sa conduite à mon égard. S’il a songé à faire de moi un prosélyte pour sa cause ruinée, la violence et la contrainte n’étaient vraisemblablement pas des moyens propres à réussir auprès d’un esprit généreux. Mais quand même son dessein serait tel, à quoi pourrait lui servir l’acquisition d’un partisan isolé et ne marchant qu’à contre-cœur, qui n’aurait que sa personne à offrir pour le soutien de la cause ? Il avait prétendu avoir sur moi les droits d’un tuteur ; il avait plus que donné à entendre que j’étais dans une situation d’esprit telle que je ne pouvais me passer d’un pareil guide. Cet homme qui poursuivait avec tant d’opiniâtreté l’exécution de ses projets désespérés, cet homme qui semblait vouloir soutenir, à lui seul, sur ses propres épaules, une cause qui avait entraîné la ruine de tant de milliers d’audacieux, était-il donc l’individu qui avait le pouvoir de décider de mon destin ? Était-ce de lui que j’avais à redouter ces périls dont on m’avait