Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/200

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compter sur une récompense libérale, outre qu’il aura la conviction d’avoir rempli un véritable devoir d’humanité. »



LA VISITE.


Mon cher Alan,


Comme je vous suis aussi vivement attaché dans mon inquiétude et ma détresse que dans les jours les plus brillants de notre amitié, c’est à vous que j’adresse une histoire qui peut-être tombera en des mains étrangères. J’éprouve une partie de mon ancienne gaieté, quand j’écris votre nom ; et me livrant à la consolante pensée que vous pouvez m’arracher à la situation fâcheuse et alarmante où je me trouve actuellement, comme vous avez été mon guide et mon conseiller dans toutes les occasions précédentes, je vaincrai le découragement qui sans ce motif m’accablerait. Je m’efforcerai donc, puisque j’ai, Dieu le sait, tout le temps de vous écrire, d’exprimer ma pensée avec autant de franchise et de liberté qu’autrefois, quoique probablement sans la même insouciance et le même bonheur.

Si ces papiers arrivaient en d’autres mains que les vôtres, je ne regretterais pas d’y voir ainsi exposé mes sentiments ; car, en faisant d’une manière raisonnable la part aux folies, suites ordinaires de la jeunesse et de l’inexpérience, je ne crains pas d’avoir à rougir dans mon récit. J’espère même que la simplicité naïve et la franchise entière avec lesquelles je vais rapporter toute sorte d’événements bizarres et fâcheux peuvent prévenir un étranger même en ma faveur, et qu’au milieu d’une multitude de circonstances triviales que je détaille tout au long, on pourra trouver une clef pour me mettre en liberté.

Une autre chance me reste très-certainement : — ce journal, comme je puis l’appeler, peut ne jamais parvenir ni à l’excellent ami auquel je l’adresse ni à un étranger indifférent, mais devenir la proie des personnes dont je suis maintenant le prisonnier. Eh bien, soit ; — elles n’apprendront guère autre chose que ce qu’elles savent déjà : qu’en ma qualité d’homme et d’Anglais, mon âme se révolte contre les traitements que j’ai reçus ; que je suis décidé à essayer de tous les moyens possibles pour obtenir ma liberté ; que la captivité n’a point abattu mon courage, et que bien qu’elles