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ordinaire du patois écossais, que l’accent du quartier Saint-James[1] diffère de celui de Billingsgate[2] dans la cité. Elle n’appuyait guère plus sur les voyelles qu’on ne le fait dans la langue italienne ; et elle n’avait rien de ce parler traînant, si désagréable à l’oreille de l’habitant du midi. En un mot, elle semblait parler le dialecte jadis en usage à l’ancienne cour d’Écosse, langage qui ne pouvait renfermer de locutions vulgaires ; et les gestes et l’expression vive qui l’accompagnaient, étaient tellement d’accord avec le son de sa voix et la manière de s’énoncer, que je ne puis assigner à tout l’ensemble aucune autre origine. Peut-être aussi les manières de l’ancienne cour d’Écosse s’étaient-elles formées à la longue sur celles de la cour de France, avec lesquelles elles avaient certainement beaucoup de ressemblance. Quoi qu’il en soit, je vivrai et je mourrai avec la persuasion que celles de mistress Baliol, si agréables et si distinguées, lui venaient en ligne directe des hautes et nobles dames qui embellirent autrefois de leur présence le palais royal d’Holy-Rood.







CHAPITRE VII.

collaboration de mistress baliol.


D’après le portrait que je viens de tracer de mistress Bethune Baliol, le lecteur croira sans peine que, lorsque je songeai à publier un recueil de mélanges, je fondai de grandes espérances sur ses souvenirs et son humeur communicative : j’y comptai, en effet, comme sur l’un des principaux soutiens de mon entreprise. Quant à elle, elle ne désapprouva en aucune manière mon projet littéraire ; mais elle ne s’expliqua que d’une façon très-vague sur la manière dont elle pourrait m’aider dans son exécution. Peut-être devrai-je attribuer le doute où elle me laissait à cet égard à une sorte de coquetterie féminine, qui veut voir solliciter la faveur que secrètement elle est assez disposée à accorder. Peut-être encore la bonne vieille dame, convaincue que le terme de sa carrière, déjà prolongée au-delà des bornes communes, approchait à grands pas, préféra me donner, sous la forme d’un legs, les matériaux

  1. Où se tient la cour à Londres. a. m.
  2. Marché aux poissons, à Londres. a. m.