Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/347

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libre et franc parler. Un vakeel, où messager du gouvernement, part demain matin pour Seringapatam ; tâchez de le joindre en route, son passe-port vous protégera tous deux. Ne connaissez-vous aucun des chefs qui entourent la personne d’Hyder ?

— Aucun, excepté son dernier émissaire en cette ville, Barak el Hadgi, répliqua Hartley.

— Son appui, et pourtant ce n’est qu’un fakir, peut être aussi efficace que celui des personnages d’une plus grande importance. Et pour dire la vérité, quand le caprice d’un despote est la question en litige, on ne peut savoir sur quoi l’on peut compter davantage… Suivez mon conseil, mon cher Hartley, abandonnez cette pauvre fille à sa destinée. Après tout, en tenant à la sauver, il y a cent à parier contre un que vous ne faites qu’assurer votre propre ruine. »

Hartley secoua la tête et se hâta de dire adieu à Esdale, le laissant dans cet heureux état de satisfaction intérieure que ressent un homme qui, ayant donné le meilleur conseil possible à un ami, peut en conscience se laver les mains de toutes les conséquences. »

Ayant rempli sa bourse, se faisant accompagner de trois fidèles domestiques, naturels du pays, montés comme lui sur des chevaux arabes, n’emportant pas de tentes et fort peu de bagages, Hartley, dans son inquiétude, ne perdit pas un seul instant et prit le chemin de Mysore. Il cherchait pendant sa route à se rappeler toutes les histoires qu’on lui avait racontées sur la justice et la patience d’Hyder, afin de se convaincre qu’il trouverait le nabab disposé à protéger une malheureuse femme, même contre le futur héritier de son empire.

Avant de sortir du territoire de Madras, il rattrapa le vakeel, dont Esdale avait parlé. Cet homme accoutumé à permettre aux aventureux marchands d’Europe, qui désiraient visiter la capitale d’Hyder, de partager, pour une somme d’argent, la protection, le passe-port et l’escorte qu’on lui accordait, n’eut aucune envie de refuser le même service à un homme en crédita Madras ; et, mis en bonne humeur par une généreuse gratification, il continua sa route avec toute la célérité possible. C’était un voyage qu’on ne pouvait faire sans beaucoup de fatigues et sans d’immenses dangers, puisqu’il fallait traverser un pays fréquemment exposé à tous les maux de la guerre, surtout aux approches des Ghauts, ces terribles défilés qui conduisent par les montagnes au plateau de Mysore, et à travers lesquels les fleuves considérables qui pren-