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s’il n’eût clé affecté par ces premiers et derniers gages de l’alloction de sa mère. Il appuya sa tête contre une table, et versa d’abondantes larmes. Hartley le laissa seul pendant plus d’une heure, et, à son retour, il le trouva presque dans la même attitude où il l’avait laissé.

« Je regrette de vous troubler en ce moment, dit-il, mais j’ai encore une partie de ma mission à remplir. Il faut que je vous mette en possession du dépôt que votre mère m’a remis entre les mains… Je dois aussi vous rappeler que le temps s’écoule, et qu’il vous reste à peine une heure ou deux pour décider si vous changerez votre projet d’aller aux Indes, par suite du nouveau point de vue sous lequel je vous ai présenté votre position. »

Middlemas prit les billets que sa mère lui avait légués. Lorsqu’il releva la tête, Hartley put remarquer que son visage était baigné de pleurs. Pourtant il calcula la somme avec une exactitude mercantile ; et quoiqu’il prît la plume pour en donner une quittance avec un air de tristesse inconsolable, il la rédigea néanmoins dans les termes convenables, en homme qui était absolument maître de ses sens.

« Et maintenant, » dit-il ensuite d’une voix triste, « donnez-moi la déclaration de ma mère. »

Hartley tressaillit presque, et se hâta de répondre : « Je vous ai remis la lettre de votre malheureuse mère, qui vous était destinée ; c’est à moi qu’est adressée la déclaration. Elle m’autorise à disposer d’une somme considérable… elle intéresse les droits de tierces personnes, et je ne puis m’en dessaisir.

— Assurément, il serait mieux de la remettre entre mes mains, ne serait-ce que pour la mouiller de mes larmes, répliqua Middlemas. Ma destinée, Hartley, a été bien cruelle. Vous voyez que mes parents avaient indubitablement l’intention de me faire leur héritier ; un accident a empêché l’exécution de leur dessein. Et maintenant ma mère vient à moi avec une tendresse maternelle, et tandis qu’elle s’occupe d’avancer ma fortune, elle fournit un témoignage qui peut la détruire… Allons, allons, Hartley… vous devez sentir que ma mère écrivit tous ces détails uniquement pour que j’en eusse connaissance. J’en suis le légitime propriétaire, et j’insiste pour qu’ils me soient remis.

— J’en suis fâché, mais je dois persister à ne point accéder à votre demande, » répondit Hartley en remettant les papiers dans son portefeuille. « Il faut songer que, si cet entretien a détruit les