Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/266

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bre de figures blanches ne manquaient jamais de jeter la terreur parmi ces coquins de moricauds ; et puis, sans compter les bonnes aubaines qu’on trouvait sous la main, à la prise d’assaut d’un pettah ou au pillage d’une pagode, la plupart de ces chiens basanés portaient de tels trésors sur leurs personnes, qu’une bataille gagnée valait une mine d’or.

Les habitants de Middlemas écoutaient les merveilleux récits du noble capitaine avec des sentiments divers, selon que leurs caractères étaient d’une nature active ou tranquille. Mais personne ne pouvait en contester la vraisemblance ; et comme il était connu pour un gaillard hardi et entreprenant, doué de certaines qualités, et, suivant l’opinion générale, incapable d’être jamais retenu par aucun scrupule particulier de conscience, pourquoi Tom Hillary n’aurait-il pas profité, comme tant d’autres, des chances que l’Inde, agitée par la guerre et par les dissensions intestines, semblait offrir à tout audacieux aventurier ? Il fut donc accueilli par ses anciennes connaissances de Middlemas, plutôt avec le respect dû à ses richesses supposées que d’une manière conforme à l’humilité de ses anciennes prétentions.

Plusieurs des notables du village se tenaient cependant à l’écart. De ce nombre, et en première ligne, était le docteur Grey, ennemi déclaré de tout ce qui sentait la fanfaronnade, et connaissant assez bien le monde pour établir cette règle générale : l’homme qui parle beaucoup de se battre est rarement un brave soldat ; de même, celui qui vante beaucoup ses richesses n’est pas souvent un homme riche, au bout du compte. Le clerc Lawford n’était pas moins réservé, malgré ses conférences avec Hillary au sujet de l’acquisition que celui-ci se proposait de faire. La froideur que témoignait au capitaine son ancien patron était censée venir de certaines circonstances remontant à l’époque de leurs premières relations ; mais, comme le clerc lui-même n’expliqua jamais de quelle nature elles étaient, il est inutile de nous épuiser en conjectures à ce sujet.

Richard Middlemas retourna tout naturellement avec son vieux camarade, et c’était la conversation d’Hillary qui lui avait communiqué, au sujet des Indes, cet enthousiasme auquel nous l’avons vu se livrer. À dire vrai, il était impossible à un jeune homme dépourvu de toute expérience du monde, et doué d’un caractère très-aventureux, d’écouter froidement les brillantes descriptions d’Hillary, qui, quoique simple capitaine-recruteur, avait toute