Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/199

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d’accord avec la ponctualité de mon excellent ami, » pensais-je. Et après avoir de nouveau tourmenté James, mon domestique mâle, en l’interrogeant à tout moment sur l’heure, le lieu et la manière dont il avait remis le paquet, je n’eus plus qu’à chercher dans mon imagination les motifs du silence de M. Fairscrihe. Parfois je croyais que son opinion sur l’ouvrage avait été si défavorable, qu’il craignait de me faire de la peine en me la communiquant… Parfois je pensais que le volume n’était pas arrivé entre les mains auxquelles il était destiné, mais qu’il s’était glissé dans l’étude, et était devenu un sujet de critique pour les clercs malins et insuffisants. « Morbleu ! pensai-je, si j’en étais sûr, je… »

« Et que feriez-vous ? me dit la Raison, après quelques instants de réflexion : vous avez l’ambition d’introduire votre livre dans tous les cabinets et salons de lecture d’Édimbourg, et cependant vous prenez feu à l’idée qu’il est critiqué par les jeunes gens de M. Fairscribe ! De grâce, soyez plus conséquent.

— Je serai conséquent, » dis-je avec humeur ; « mais malgré tout, je verrai M. Fairscribe, dès ce soir. »

Je dînai à la hâte, j’endossai ma redingote (car on était menacé de pluie pour la soirée) et je me rendis à la maison de mon ami. Le vieux domestique ouvrit la porte avec précaution, et, avant que je lui adressasse une question : « M. Fairscribe est bien chez lui, monsieur, me dit-il ; mais la nuit du dimanche… » Reconnaissant néanmoins ma figure et ma voix, il ouvrit tout à fait la porte, me fit entrer, et me conduisit dans le salon, où je trouvai M. Fairscribe et le reste de sa famille, occupés à écouter un sermon de feu M. Walker d’Édimbourg, que miss Catherine lisait avec une clarté, une simplicité et un goût peu ordinaires. Bien reçu comme ami de la maison, je n’avais plus rien à faire qu’à m’asseoir tranquillement, et, faisant de nécessité vertu, à m’efforcer de profiter, le mieux possible, d’un excellent sermon. Mais, je le crains, la vigoureuse logique de M. Walker et la précision de son style furent un peu perdues pour moi. Je sentais que j’avais mal choisi mon temps pour venir troubler M. Fairscribe, et lorsque la lecture fut finie, je me levai pour prendre congé, un peu précipitamment, je crois. « Une tasse de thé, monsieur Croftangry, dit la jeune miss. — Il faut rester et manger votre part d’un souper presbytérien, ajouta M. Fairscribe. Il est neuf heures… je me fais un scrupule de conserver les heures de mon père pour le soir du dimanche. Peut-