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quand il vit que personne ne le saluait, et se plaça près du feu à quelque distance de la table à laquelle Harry Wakefield, le bailli et deux ou trois autres individus étaient assis. La vaste cuisine, à la mode du Cumberland, aurait fourni assez de place pour rendre les distances encore plus grandes entre les deux amis.

Robin s’étant assis, s’occupa d’allumer sa pipe, et demanda une pinte de bière à deux sous.

« Nous n’avons point de bière à deux sous, » répondit Ralph Heskett le cabaretier ; mais comme tu te fournis toi-même de tabac, tu peux aussi bien te fournir de boisson. C’est, je crois, la coutume de ton pays.

— Fi ! notre homme, » dit l’hôtesse, petite femme vive, enjouée, et qui s’empressa d’apporter de la bière au nouveau venu ; « fi ! tu sais bien ce que cet étranger demande, et ton métier est d’être poli. Tu devrais savoir que si l’Écossais aime les petites mesures, il paie en bon argent. »

Sans faire aucune attention à ce dialogue entre les deux époux le montagnard prit son verre, et, s’adressant à la compagnie en général, il porta ce toast, intéressant pour chacun : « Aux bons marchés !

— Il serait à souhaiter que le vent nous soufflât moins de marchands du nord, et moins de vieilles vaches des montagnes pour dévorer nos pâturages anglais, dit un des fermiers.

— Par l’âme de mon corps ! vous êtes dans l’erreur, mon ami, » répondit Robin avec calme ; » ce sont vos gros Anglais qui dévorent nos bestiaux écossais, pauvres bêtes !

— Je voudrais que quelqu’un dévorât leurs conducteurs, dit un autre ; un Anglais honnête ne peut gagner son pain sans les rencontrer dans son chemin.

— Ni un fidèle serviteur conserver la faveur de son maître, si un Écossais se glisse entre lui et le soleil, ajouta le bailli.

— Si ce sont là des plaisanteries, » reprit Robin Oig avec le même calme, « c’est en amasser trop à la fois sur un même homme.

— Ce ne sont point des plaisanteries, mais des choses sérieuses, reprit le bailli. Écoutez, M. Robin Oig, ou quelque soit votre nom, il est bon que vous sachiez que nous n’avons tous qu’une même opinion, et que cette opinion est que vous, mons Robin Oig, vous vous êtes conduit envers notre ami, M. Harry Wakefield, comme un fourbe et un drôle.

— Sans doute, sans doute, » répondit Robin toujours avec mo-