Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/111

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un beau jeune homme, à la chevelure blonde, aux joues vermeilles, au regard d’aigle, et qui était doué de toute l’agilité, sinon de toute la force physique de son redoutable père, dont l’histoire et les exploits ne manquaient pas de lui être racontés souvent par sa mère, afin de disposer son âme à une carrière aussi aventureuse. Mais la jeunesse voit l’état présent de ce monde variable d’un œil plus pénétrant que la vieillesse. Quoique tendrement attaché à sa mère et disposé à faire tout ce qui serait en son pouvoir pour assurer son existence, Hamish reconnut cependant, quand il fut en état de connaître le monde, que la vie de cateran était désormais aussi dangereuse que déshonorante, et que, s’il devait suivre les exemples de valeur que lui avait donnés son père, ce devait être dans toute autre carrière plus conforme aux principes et aux idées du jour.

À mesure que les facultés de l’esprit et du corps se développèrent en lui, il sentit plus vivement la nature précaire de sa situation ; il reconnut l’erreur des opinions de sa mère, et son ignorance totale relativement aux changements et aux réformes opérés dans la société qu’elle ne fréquentait plus. En se mêlant parmi ses voisins, il compara leur situation à la sienne, et il s’aperçut, pour la première fois, de l’exiguïté des moyens d’existence auxquels sa mère était réduite, et il apprit qu’elle ne possédait rien, ou presque rien au-delà des choses les plus urgentes de la vie, choses dont souvent même elle était sur le point de manquer. Quelquefois ses succès à la pêche ou à la chasse venaient augmenter les faibles provisions du ménage ; mais il ne voyait d’autre ressource fixe et assurée que celle de s’abaisser à un travail servile, ressource qui, dans la supposition où il consentirait à s’y soumettre, ne manquerait pas de faire une blessure mortelle à l’orgueil de sa mère.

Elspat, de son côté, vit avec surprise que Hamish Beam, quoique d’une taille haute et belle, quoique propre sous tous les rapports à la carrière des armes, ne montrait aucune disposition pour le genre d’exploits par lesquels s’était distingué son père. Il y avait au fond du cœur de cette mère un sentiment qui l’empêchait de l’engager, d’une manière formelle et positive, à commencer la vie de cateran, et les périls inséparables d’une telle carrière l’épouvantaient pour son fils. Lorsqu’elle voulait lui parler à ce sujet, son imagination ardente lui présentait l’ombre de son époux s’élevant entre son fils et elle, revêtue de son tartan ensanglanté,