Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/108

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avait été autrefois la belle et heureuse femme de Hamish[1] Mac Tavish, qui, par sa force extraordinaire, sa valeur et ses hauts faits, avait obtenu le titre de Mac Tavish Mhor[2]. La vie de cet homme avait toujours été turbulente et semée de troubles et de dangers, parce qu’ayant calqué ses mœurs sur celles des anciens montagnards, il regardait comme une honte de manquer de quoi que ce fût, lorsqu’il pouvait le prendre. Les gens des basses terres qui habitaient dans son voisinage, et qui désiraient jouir en paix de leur vie et de leurs biens, se résignaient à lui payer un petit tribut sous le nom de protection-money[3], et se consolaient par ce vieux proverbe : « Il vaut mieux flatter le diable que de le combattre. » Ceux qui regardaient une telle convention comme déshonorante se trouvaient bien souvent surpris par Mac Tavish Mhor et ses partisans, qui avaient coutume de les punir par une amende proportionnée à leur rang ou à leurs propriétés ; quelquefois même ils faisaient entrer ces deux considérations réunies dans le châtiment imposé aux vaincus. On se souvient encore de quelle manière il enleva, dans une incursion, cent cinquante vaches à Monteith, et comment il fit mettre le laird de Ballybught, tout nu, dans un bourbier, pour l’avoir menacé d’envoyer chercher une compagnie de highlands watch[4] pour défendre ses propriétés.

Quels que fussent de temps à autre les triomphes de cet audacieux cateran[5], ils étaient souvent achetés par des revers, et l’adresse avec laquelle il échappait au danger, la rapidité de sa fuite, et les stratagèmes ingénieux qu’il employait pour se tirer du péril le plus imminent, n’étaient pas moins que ses exploits l’objet du souvenir et de l’admiration. Dans la prospérité ou dans le malheur, à travers les fatigues, les embarras et les dangers de toute espèce, Elspat fut toujours sa compagne fidèle. Elle jouissait avec lui de ses moments de gloire et de bonheur ; et, quand l’adversité venait peser sur eux, sa force d’âme, sa présence d’esprit et son courage servirent plus d’une fois, dit-on, à stimuler les efforts de son époux.

Leur moralité était exactement celle des anciens montagnards : ils étaient amis fidèles et ennemis implacables. Ils regardaient

  1. Hamish, c’est-à-dire, James ou Jacques. a. m.
  2. Ce dernier mot veut dire grand. a. m.
  3. Ou black mail, espèce de taxe que les hommes tels que Rob-Roy faisaient payer aux fermiers écossais. a. m.
  4. La garde des Highlands. a. m.
  5. C’était le nom des marchands écossais des montagnes. a. m.