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gnement d’une bonne corde à l’un des bras. — Croix qu’il ne portera pas, mais qui lui servira de support ! » reprit le duc ; et il partit d’un éclat de rire à cette excellente saillie ; « allons ! qu’il prenne ses degrés sous Tristan ; votre compère est un habile professeur en cette science. »

Le roi répondit si cordialement à ce bruyant témoignage de la gaieté de Charles, que celui-ci ne put s’empêcher de lui dire en le regardant d’un air presque amical : « Ah ! Louis, Louis, plût à Dieu que vous fussiez un prince aussi fidèle que vous êtes un joyeux compagnon ! Je pense encore bien souvent aux jours de plaisirs que nous avons naguère passés ensemble. — Il dépend de vous de les voir revenir, répondit Louis, je vous accorderai les conditions les plus avantageuses que, sauf mon honneur, et sans vous rendre vous-même la fable de la chrétienté, vous puissiez me demander dans la situation où je me trouve, et je ferai serment de les observer, sur la sainte relique que j’ai le bonheur de porter sur moi, et qui est un morceau de la vraie croix. »

En parlant ainsi, il fit voir un petit reliquaire d’or qui était suspendu à son cou par une chaîne de même métal, et qu’il portait par-dessus sa chemise ; puis il ajouta, après l’avoir baisée dévotement : « Jamais faux serment n’a été fait sur cette relique sacrée qu’il n’ait été puni dans l’année. — Cependant, dit le duc, c’est la même sur laquelle vous m’avez juré amitié en quittant la Bourgogne ; et bientôt après, vous envoyâtes le bâtard de Rudempré pour m’assassiner ou s’emparer de ma personne. — Ah, beau cousin ! vous réveillez là d’anciens griefs ; mais je vous assure que vous êtes dans l’erreur à ce sujet. D’ailleurs, ce n’est pas sur cette relique que j’ai fait le serment dont il s’agit ; c’était sur un autre morceau de la vraie croix, présent que m’a fait le grand-seigneur, mais sa vertu s’était sans doute affaiblie pendant son séjour chez les infidèles. Eh bien ! la guerre du bien public n’éclata-t-elle pas dans l’année ? une armée bourguignonne ne campa-t-elle pas à Saint-Denis, soutenue par tous les grands feudataires de France ? et ne fus-je pas obligé de céder la Normandie à mon frère ? Ô mon Dieu, préservez-moi de me parjurer sur une si sainte relique ! — Eh bien, cousin, je crois que vous avez reçu une leçon suffisante pour garder votre foi à l’avenir ; et aujourd’hui, par exemple, répondez avec franchise et sans détour : êtes-vous disposé à tenir votre promesse, et à marcher avec moi contre le meurtrier de la Marck et ses dignes alliés les Liégeois, pour en tirer une ven-