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nières à la cour de Bourgogne, ce qu’aucun de ceux que je vois ici décorés du collier de ces ordres ne m’aurait conseillé, je pense, j’ai atteint autant que possible le même but, en les plaçant entre les mains du vénérable père en Dieu, devenu depuis un saint dans le ciel… » Ici Louis parut très-affecté et porta son mouchoir à ses yeux : « entre les mains, dis-je, d’un membre de ma propre famille, encore plus étroitement lié à la maison de Bourgogne ; d’un homme, enfin, à qui son rang élevé dans l’Église, non moins, hélas ! que ses nombreuses vertus, donnait le droit d’être pendant quelque temps le protecteur de deux femmes sans asile, et de se faire leur médiateur auprès de leur seigneur naturel. Je dis donc que les seules circonstances qui, au premier aspect, ont inspiré à mon frère de Bourgogne d’indignes soupçons contre moi, peuvent être expliquées par les plus nobles et les plus honorables motifs ; je dis de plus qu’on ne peut apporter le moindre témoignage digne de foi à l’appui des accusations injurieuses qui ont engagé mon frère à retirer ses sentiments d’amitié à un homme, à un roi venu à sa cour sur la foi de cette amitié, accusations qui l’ont porté à convertir la salle de festin en une cour de justice, et son toit hospitalier en une prison. — Sire ! Sire ! » s’écria Charles dès que le roi eut cessé de parler ; « si vous êtes arrivé ici dans un moment qui coïncidait si malheureusement avec l’exécution de vos projets, je ne puis l’expliquer qu’en supposant que ceux qui font profession de tromper les autres se trompent quelquefois parfaitement eux-mêmes. L’artificier est quelquefois tué par l’explosion du pétard qu’il a préparé. Quant au reste, tout dépend du résultat de cette enquête solennelle. Qu’on fasse entrer la comtesse Isabelle de Croye. » Isabelle arriva, soutenue d’un côté par la comtesse de Crèvecœur, qui avait reçu à ce sujet les ordres de son mari, et de l’autre par l’abbesse du couvent des Ursulines. Dès qu’elle fut entrée, Charles s’écria avec la rudesse de ton et de manières qui lui était habituelle : « Ainsi donc, belle princesse, vous qui pouviez à peine nous répondre, tant votre respiration était gênée, lorsque nous vous intimions des ordres justes et raisonnables, vous avez trouvé assez d’haleine pour fournir une course aussi longue que le pourrait faire une biche poursuivie par le chasseur. Que pensez-vous de votre belle équipée ? Êtes-vous satisfaite d’avoir allumé la guerre entre deux grands princes et deux puissants États à cause de votre joli minois ? »

La publicité de cette scène, la violence des gestes de Charles,