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vous aurai conduite à la cour du duc à Péronne ; et c’est dans ce dessein que je crois devoir remettre le commandement de ce détachement à mon neveu le comte Étienne, tandis que j’aurai l’honneur de vous y accompagner, car je pense que vous pourrez avoir besoin d’un intercesseur. J’espère que ce jeune étourdi s’acquittera de ses devoirs avec sagesse et prudence. — Avec votre permission, bel oncle, dit le comte Étienne, si vous doutez que je sois capable de commander vos hommes d’armes, vous pouvez rester avec eux ; je prendrai volontiers la charge de serviteur et de gardien de la comtesse Isabelle de Croye. — Sans doute, beau neveu, c’est vraiment renchérir d’une manière admirable sur mon dessein : mais à vous parler franchement, je l’aime autant tel que je l’ai conçu. Ayez donc la complaisance de vous rappeler que votre affaire ici n’est pas de donner la chasse à ces pourceaux noirs, occupation pour laquelle vous paraissiez, il y a peu d’instants, avoir une vocation toute particulière, mais de me rapporter des nouvelles certaines de ce qui se passe dans le pays de Liège, afin que nous sachions à quoi nous en tenir sur les bruits étranges que l’on fait courir. Je n’ai besoin à ma suite que d’une dizaine de lances ; les autres resteront sous ma bannière : je vous en donne le commandement. — Un instant, cousin Crèvecœur, dit la comtesse ; en me rendant prisonnière, que du moins il me soit permis de stipuler la sûreté de ceux qui m’ont secourue dans mes malheurs. Permettez à ce brave garçon, mon guide fidèle, de retourner librement dans la ville de Liège. »

Après avoir jeté un regard pénétrant sur la large et honnête figure de Glover, Crèvecœur répondit : « Ce brave garçon ne paraît nullement dangereux : il restera avec mon neveu, et l’accompagnera aussi loin qu’il pourra s’avancer sur le territoire de Liège ; il sera libre ensuite d’aller où bon lui semblera. — Ne manquez pas de me rappeler au souvenir de la bonne Gertrude, » dit la comtesse à son guide, « et, » ajouta-t-elle en lui présentant un collier de perles qu’elle tira de dessous son voile, « priez-la de porter ceci en mémoire de sa malheureuse amie. »

L’honnête Glover prit le collier, et baisa avec une galanterie toute campagnarde, mais avec une affection sincère, la belle main qui le récompensait d’une manière si délicate des fatigues et des périls auxquels il venait de s’exposer.

« Ah ! ah ! des signes et des gages d’amitié ! » murmura le comte d’un air mécontent. « Avez-vous encore quelque autre cadeau à