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flèche n’est pas partie. N’y pensons plus ; nous conduirons celle-ci à Guillaume à la longue barbe. Quand il se sera gorgé de vin avec ses vassaux, suivant sa coutume, il ne distinguera pas une vieille comtesse d’une jeune. Allons, Rizpah, du courage ! Le brillant Aldebaran[1] déverse encore son influence sur les enfants du désert. »


CHAPITRE XXI.

LE SAC DU CHÂTEAU.


La miséricorde ne pourra plus entrer dans les cœurs, le soldat farouche et irrité promènera partout sa main sanglante, avec une conscience aussi large que l’enfer.
Shakspeare, Henri V.


La garnison du château de Schonwaldt, quoique surprise et d’abord frappée de terreur, opposa pendant quelque temps une vigoureuse résistance aux assaillants. Mais la foule immense qui sortait des murs de Liège, se précipitant à l’assaut comme un essaim d’abeilles, divisait l’attention des soldats et abattait leur courage.

Il y avait aussi du mauvais vouloir, peut-être même de la trahison, parmi les défenseurs du château, car quelques-uns proposaient de se rendre, tandis que d’autres, abandonnant leur poste, cherchaient à fuir. Plusieurs s’élançaient du haut des murs dans le fossé, et ceux qui réussissaient à ne pas se noyer, jetant loin d’eux tout ce qui aurait pu les faire reconnaître, afin d’échapper plus sûrement, se mêlaient ensuite à la foule bigarrée des assaillants. Un petit nombre, par attachement à la personne de l’évêque, se rangèrent autour de lui, et continuèrent de défendre la tour où il s’était réfugié ; et plusieurs autres, craignant qu’on ne leur fît aucun quartier, ou poussés par le courage du désespoir, défendaient les boulevards les plus éloignés ou quelques autres tours de cet immense bâtiment. Cependant les assaillants, maîtres des cours et des parties inférieures de l’édifice, s’occupaient à poursuivre les vaincus et à le mettre au pillage, lorsque tout à coup un seul homme, comme s’il eût cherché la mort au moment même où tous les autres la fuyaient, s’efforça de se frayer un

  1. Aldebaran est une superbe étoile primaire de la constellation du Taureau ; elle forme avec plusieurs autres une espèce de V couché >. Voyez mes Lettres sur l’astronomie, tome III, p. 172. a. m.