Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/271

Cette page a été validée par deux contributeurs.

meilles comme des cerises, à des yeux bleus remplis d’enjouement, et à un teint d’une pureté et d’une blancheur parfaites, se mit en devoir de conduire le bel étranger à travers le jardin du sieur Pavillon, jusqu’au bord de l’eau ; là Quentin monta dans une barque conduite par deux vigoureux Flamands vêtus de larges pantalons, de jaquettes garnies de nombreux boutons, et la tête couverte d’un bonnet fourré. Bientôt la jeune fille le vit s’éloigner avec toute la rapidité que leur lenteur flamande permettait aux deux bateliers d’imprimer à leurs avirons.

Comme la gentille Trudchen ne parlait qu’allemand, Quentin, sans aucun préjudice pour la tendresse fidèle qu’il avait vouée à la comtesse de Croye, ne put remercier sa jeune libératrice qu’en imprimant un baiser sur ses lèvres aussi roses que des cerises ; et ce baiser, donné avec une exquise galanterie, fut reçu avec une gratitude modeste ; car des galants de la taille et de la figure de notre archer écossais ne se rencontraient pas tous les jours parmi les bourgeois de Liège.

Tandis que la barque remontait le cours paresseux de la Meuse, et s’éloignait des fortifications de la ville, Quentin eut le temps de réfléchir sur le rapport qu’il devait faire de son aventure à Liège quand il serait de retour au château de Schonwaldt. Repoussant toute idée de trahir quiconque avait mis sa confiance en lui, cette confiance ne lui eût-elle été accordée que par suite d’une méprise, mais non moins déterminé à ne pas cacher au vénérable prélat les dispositions séditieuses qui agitaient en ce moment les esprits dans sa capitale, il résolut de ne faire qu’un récit vague et général, afin de mettre l’évêque sur ses gardes, sans que personne en particulier fût exposé à sa vengeance.

Il débarqua à un demi-mille du château, et donna un guilder à ses conducteurs, qui parurent entièrement satisfaits. Quelque peu éloigné qu’il se trouvât de Schonwaldt, la cloche avait sonné le dîner lorsqu’il arriva, et il s’aperçut, en outre, qu’il était arrivé par un côté différent de celui de l’entrée principale, et qu’il prolongerait son retard s’il entreprenait de faire le tour du château. Il s’avança donc sans hésiter vers le côté dont il était le plus près : c’était un mur fortifié qu’il présuma être celui du petit jardin dont nous avons déjà parlé ; une poterne percée dans ce mur ouvrait sur les fossés, et un esquif était amarré près de cette poterne. Il espéra donc qu’en appelant, quelqu’un paraîtrait et lui amènerait l’esquif pour l’aider à traverser les fossés. Comme il s’avançait