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n’eussent été les boucles de cheveux noirs qui tombaient autour de son visage, et un air de férocité, joint à une maigreur qui le faisait ressembler à un sauvage plutôt qu’à un homme civilisé.

« C’est encore un Bohémien, » se dirent les deux dames l’une à l’autre. « Sainte-Marie ! le roi peut-il encore avoir placé sa confiance dans un de ces brigands ? — Je questionnerai cet homme, si vous le désirez, dit Quentin, et je m’assurerai de sa fidélité autant qu’il me sera possible. »

Durward, de même que les dames de Croye, avait reconnu dans le costume et l’apparence de cet homme l’habillement et les manières de ces vagabonds avec lesquels il avait été si prêt d’être confondu, grâce à la célérité des procédés de Trois-Échelles et de Petit-André ; il était donc naturel qu’il vît du danger à se confier à un individu de cette race vagabonde.

« Es-tu venu ici pour nous chercher ? » fut la première question qu’il lui adressa.

L’étranger répondit par un signe de tête affirmatif.

— « Et dans quel dessein ? — Pour vous guider jusqu’au palais de celui de Liège. — De l’évêque, veux-tu dire ? »

Le Bohémien fit un nouveau signe affirmatif.

— « Quelle preuve peux-tu me donner que nous devons te croire ? — Pas d’autre que ce vieux refrain :

Le page tua le sanglier,
Le prince en eut la gloire[1].

— La preuve est bonne, dit Quentin ; marche en avant, mon garçon ; je ne tarderai pas à revenir te parler. » Retournant aussitôt auprès des dames, il leur dit : « Je suis convaincu que cet homme est le guide que nous devons attendre ; car il m’a donné un mot d’ordre que je crois n’être connu que du roi et de moi. Mais je vais causer de nouveau avec lui, et je tâcherai de m’assurer du degré de confiance qu’on peut lui accorder. »


  1. The page slew the boar.
    The peer had the gloire.