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les. Encore une fois, major, revenez à des sentiments plus modérés ; reprenez votre épée, et consentez à oublier la personne que vous avez vue au château de Martindale. — Jamais ! répondit Bridgenorth ; le crime de cette femme cruelle sera de tous les crimes de ce monde le dernier que j’oublierai. Mon dernier vœu en quittant la vie sera de voir son forfait puni par la justice. — Si tels sont vos sentiments, dit lady Peveril, quoiqu’ils tiennent bien plus du désir de la vengeance que de l’amour de la justice, je dois m’occuper de pourvoir à la sûreté de mon amie en m’assurant de votre personne. On aura soin de vous fournir dans cet appartement tout ce qui pourra vous être nécessaire et agréable, et j’enverrai un messager à Moultrassie-House, pour épargner à vos gens l’inquiétude que votre absence ne manquerait pas de leur causer. Dans quelques heures peut-être, ou dans deux jours au plus, je viendrai moi-même mettre fin à votre réclusion, et vous demander pardon d’avoir employé contre vous les moyens de rigueur auxquels votre opiniâtreté me force maintenant de recourir. »

Le major ne répondit rien, si ce n’est qu’il était en son pouvoir et qu’il devait se soumettre à ses volontés. Alors il se dirigea vers la fenêtre, comme pour se débarrasser de la présence des deux dames.

La comtesse et lady Peveril sortirent de l’appartement en se donnant le bras, et la dernière donna ses ordres à Whitaker concernant la manière dont elle voulait que le major fût gardé et traité, lui expliquant en même temps que la sûreté de la comtesse de Derby exigeait qu’il fût surveillé de très-près.

Toutes les injonctions relatives à la garde stricte du prisonnier, comme de placer des sentinelles, de les relever d’heure en heure, etc., Whitaker les reçut avec joie ; et il jura, sur sa tête, que la détention durerait aussi long-temps que les circonstances la rendraient nécessaire. Mais le vieil intendant parut beaucoup moins disposé à la docilité lorsqu’il s’agit de régler la manière dont le major serait couché et nourri ; et il lui sembla que lady Peveril s’occupait avec un soin trop scrupuleux des besoins de son prisonnier. « Je garantis, dit-il, que ce coquin de tête-ronde a mangé hier une assez grosse part de bœuf gras pour en être rassasié pendant un mois : un jeûne de quelques jours ne ferait pas de mal à sa santé. Quant à la boisson, je lui donnerai en abondance de l’eau fraîche ; je lui en donnerai assez, je vous assure, pour rafraîchir son sang, qui est très-échauffé, je gage,