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Maulstatute ne fit pourtant pas en cette occasion à Julien l’honneur de faire atteler à son énorme carrosse de famille les deux rétives haridelles qui avaient coutume de le conduire dans cette arche à la chapelle du pur et précieux maître Howlaglass, pour y entendre le jeudi au soir une instruction, et le dimanche un sermon de quatre heures. Il eut recours à une de ces voitures de place, construites en cuir, assez rares alors ; car elles n’avaient été que récemment inventées, mais promettant déjà toutes les facilités que les carrosses de place ont fournies depuis pour toute espèce de communication honnête ou déshonnête, légale ou illégale. Notre ami Julien, jusqu’à ce moment plus accoutumé à la selle qu’à toute autre manière de voyager, se trouva bientôt dans un de ces équipages avec le constable et deux soldats armés jusqu’aux dents, le port de destination étant, comme on le lui avait déjà annoncé, l’ancienne forteresse de Newgate.



CHAPITRE XXXIII.

NEWGATE.


C’est le chien noir de notre geôle. Regardez-le, si cela vous plaît, mais d’une certaine distance ; ne l’irritez pas, il n’aboie jamais avant de mordre.
Le Chien de Newgate.


La voiture s’arrêta devant ces terribles portes qui ressemblent à celles du Tartare, excepté qu’elles permettent un peu plus souvent de sortir avec honneur et sûreté, mais au prix des mêmes inquiétudes et des mêmes fatigues qu’Hercule et deux ou trois demi-dieux eurent à souffrir pour se tirer des enfers de l’ancienne mythologie ; quelquefois aussi par l’influence du rameau d’or.

Julien descendit du carrosse, soigneusement soutenu de chaque côté par ses compagnons et par un porte-clefs ou deux, que le son d’une grosse cloche placée à la porte avait appelés à leur secours. Cette attention ne provenait pas, comme on doit bien le supposer, de la crainte qu’il fît un faux pas, mais de la peur qu’il ne tentât de s’évader, ce à quoi il ne songeait guère. Des apprentis et une troupe de désœuvrés accourus du marché voisin, qui tirait un avantage considérable des nombreuses pratiques que la conspiration papiste amenait journellement à la prison, et dont les habitants étaient en conséquences de zélés protestants, le saluèrent à sa descente de voiture par les cris : Oh ! un papiste ! un papiste ! à bas le pape et tous ses adhérents !